« Tout vert ! Le grand tournant de l’écologie, 1969-1975 » : une expo et un livre

Tout vert ! Le grand tournant de l’écologie, 1969-1975 : c’est le titre à la fois d’une exposition réalisée par le Musée du Vivant, et d’un livre coordonné par Laurent Gervereau et Cécile Blatrix.

.

par Roger Cans

.

product_thumbnail

L’exposition, installée dans une salle du premier étage du château de Grignon pour les « rendez-vous au jardin » (3, 4 et 5 juin), a été l’occasion le 4 juin 2016 de présenter l’ouvrage du même nom, préparé par Laurent Gervereau, directeur du Musée du Vivant et du CIRE (Centre international de recherche écologique) et Cécile Blatrix, professeure de science politique à AgroParisTech.

.

L’ouvrage (250 pages) explique le passage de l’écologie scientifique à l’écologie politique dans les années 1970. Il est illustré par une foule de documents, souvent inédits, provenant des collections du Musée du Vivant.

.

Le livre s’achète par carte bancaire en cliquant ici

.
L’exposition a été inaugurée par le directeur de l’Agro, Gilles Tristram, qui s’est félicité de cette initiative à la fois historique et pédagogique, qui met en valeur les très riches archives de l’ancien INA-PG (Institut national agronomique de Paris-Grignon).

.

Laurent Gervereau a ensuite présenté les deux parties de l’exposition. La première est permanente et retrace l’histoire de l’Institut national agronomique de Paris (créé en 1826) et de la ferme expérimentale de Grignon (Yvelines), devenus AgroParisTech. La nouvelle appellation a été adoptée pour un éventuel regroupement des établissements d’enseignement supérieur sur le plateau de Saclay.

.

L’exposition temporaire, elle, comporte de multiples vitrines où sont présentés les œuvres fondatrices, comme The Silent Spring de Rachel Carson, en version américaine (1961) et française (1962), Avant que nature meure de Jean Dorst, dans sa première édition (1965) et sa version anglaise, et la Socialisation de la nature (1971) de Philippe Saint-Marc (JNE). La même vitrine présente une carte Michelin du littoral aquitain annotée par le même Saint-Marc lorsqu’il fut chargé de son aménagement. Dans un coin, la bicyclette utilisée par Brice Lalonde en 1972, lors de la grande manifestation contre la voie sur berge à Paris.

.

Dans les autres vitrines, des exemplaires de la revue La Gueule ouverte de Pierre Fournier (JNE), reprise après sa mort par Isabelle Cabut, la femme du dessinateur, qui a légué une trentaine de dessins originaux au Musée du Vivant, dont le logo adopté aujourd’hui par le musée. Aux murs, les premières affiches contestataires nées de mai 68 et les affiches électorales de l’écologie politique. Toute une vitrine est consacrée aux documents de la lutte menée sur le plateau du Larzac, l’un des moments chauds de l’écologie politique naissante, sous l’impulsion notamment de José Bové. On trouve aussi des pochettes de 45 tours d’époque, comme Jacques Dutronc avec fine moustache chantant Le petit jardin. Car, contrairement à ce qu’on pourrait penser, il n’est pas toujours question d’agriculture avec le Musée du Vivant et ses archives.

.

L’inauguration de l’exposition a réuni, d’une part, des auteurs de l’ouvrage Tout Vert !, tels Henri Jaffeux, président de l’AHPNE (Association pour l’histoire de la protection de la nature et de l’environnement), Laurent Samuel (JNE) et Roger Cans (JNE), journalistes spécialisés en environnement. Etaient aussi présents des donataires d’archives au Musée du Vivant tels Philippe Saint-Marc, Dominique Allan-Michaud (président du Réseau Mémoire de l’Environnement) et Jeanne Charlotte Carlier (avec sa famille), la veuve de Jean Carlier (JNE), l’un des promoteurs de la candidature de René Dumont à la présidentielle de 1974.

.

Laurent Gervereau a rappelé que, lors d’une interview télévisée de René Dumont par Jean Carlier, la séquence du verre d’eau, « problème majeur de l’humanité », est restée dans les mémoires. Il a rappelé aussi la fameuse formule « Penser globalement, agir localement », lancée en 1972 par René Dubos, autre agronome de l’établissement qui a fait carrière à New York. Cette formule (Think global, act local) figurait dans le rapport remis aux Nations unies pour le sommet de Stockholm et s’avère toujours d’actualité. Un participant, inattendu, a indiqué qu’il possédait des archives historiques concernant la création du ministère de l’Environnement, en 1971. Il s’agit de Philippe Guérin, qui a appartenu au cabinet de Jacques Chaban-Delmas, alors Premier ministre, puis de Robert Poujade, premier ministre de l’Environnement.

.

Un point noir en suspens, qui n’a pas été évoqué mais préoccupe tous les acteurs de la conservation environnementale : le rachat éventuel du château de Grignon et de la ferme par l’émirat du Qatar, pour y loger le PSG (le club de football de Paris-Saint-Germain), dont il est le riche propriétaire. A Saint-Germain-en-Laye, l’agrandissement n’est pas possible en raison des pollutions induites par la station d’eaux usées d’Achères. La ville de Poissy a proposé un terrain, mais l’image de la ville, ancien berceau des usines automobiles Simca, ne séduit pas les émirs, qui préfèrent Grignon, avec son château du XVIIe siècle et ses hectares disponibles. Aux dernières nouvelles – qui reposent sur des rumeurs difficiles à confirmer – le Qatar ne serait plus candidat à l’achat. Mais qu’adviendra-t-il du site de Thiverval-Grignon, si le déménagement à Saclay se confirme ?

.

.


.