Affaire Bolloré/Basta/Options Futurs

Après un procès de trois ans qui a coûté beaucoup d’argent en frais d’avocat aux accusés, l’avocat de la SA Bolloré a réclamé un euro de dommages et intérêts aux parties, mais n’a pas eu gain de cause.

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par Dominique Martin Ferrari *

logo-odi-petit-300x83La diffamation n’a pas été retenue par la 7e chambre du TGI de Paris. Accusés de diffamation pour un papier sur l’accaparement des terres, le journal Bastamag, repris par le site Rue 89, la revue de presse Options Futurs+20 Scoop it, et deux blogueurs auront souffert de ce que l’Office de la déontologie de l’information nomme des procès « abusifs » qui veulent intimider la presse et toucher son point faible : le portefeuille.

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Tout a commencé le 10 octobre 2012, le site Bastamag publie un papier sur l’accaparement des terres. Le papier dénonce les pratiques des multinationales, des fonds spéculatif, des groupes français de l’agroalimentaire, aidés par les institutions financières internationales et les gouvernements locaux.

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Cette enquête va être reprise par plusieurs sites soit par le biais de liens hypertextes, soit par reproduction pure et simple de son contenu et le 16 octobre 2012, la SA Bolloré dépose plainte avec constitution de partie civile, estimant ce papier diffamatoire.

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Le 11 février 2016, nous étions tous entendus au TGI de Paris, 7e chambre (presse). De remarquables témoins se sont succédés à la barre, démontrant argument par argument les faits relatés par le papier.

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Outre le fond, la forme : Options Futurs a voulu engager une bataille sur le droit au relais par hypertexte. Notre argumentaire : à partir du moment où un papier est signé d’un auteur, publié par un titre reconnu par le droit de la presse, nous n’avons qu’un rôle de passeur et d’informateur et avons donc défendu ce qui est le fondement de la nouvelle information de réseaux.

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Corinne Lepage qui nous défendait a plaidé : « Madame la Présidente, il faudra bien un jour ou l’autre trancher sur le statut des liens hypertextes, sinon nous allons vers un engorgement massif à prévoir des tribunaux », argumentant « que le fait de procéder au renvoi par lien hypertexte à un article incriminé ou à sa reprise, à l’impossibilité d’assimiler une telle pratique à sa reprise, à l’impossibilité d’assimiler une telle pratique à une nouvelle publication ».
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Il sera intéressant au vu du rendu final du jugement de voir le travail du tribunal argument par argument. Ce que nous savons aujourd’hui, c’est que la diffamation n’ayant pas été retenue contre Basta, notre relaxe a également été prononcé,e mais sans avoir pu obtenir les dommages et intérêts demandés (afin de couvrir les frais d’avocat) car il n’y aurait pas eu d’abus de constitution de partie civile à notre encontre : « ni témérité, ni mauvaise foi dans son acte d’accusation, face à la complexité et à l’incertitude du régime de responsabilité des personnes qui usent d’un lien hypertexte ».
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Concernant les relais de liens hypertextes, la zone d’ombre persiste avec un règlement au cas par cas. Je reste donc redevable de mes 8000 euros de frais d’avocat.

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Dernière minute : Bolloré vient de faire appel (lire ici l’article de Bastamag).

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Je tenais à remercier personnellement tous ceux et toutes celles qui m’ont spontanément aidé.
Tous les amis qui par courrier m’ont soutenue et aidée
Tous les participants au pot commun lancé par l’association de journalistes JNE
Ceux qui m’ont conseillée, en particulier JL Martin Lagardette, l’ODI, Christel Leca
Des membres présents à l’AG de l’AJE.

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Grâce à vous tous, j’ai rassemblé environ 1000 euros sur 8000 et je dois encore 2000 euros à Corinne Lepage.
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Vous pouvez continuer à m’aider soit à titre personnel (courrier au 25 bd Louis Blanc, 34000 Montpellier), soit en vous abonnant à Options futurs qui pourra ainsi payer ses collaborateurs (courrier au 16 rue St Marc, 75002 Paris).

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* Journaliste carte de presse 50 989. Cet article a été publié dans le N° 33 de la lettre Options Futurs, que vous pouvez télécharger en cliquant ici.

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