Les jardins partagés de Montreuil

En préambule à leur Assemblée Générale annuelle, le 17 juin 2014, les JNE étaient invités à découvrir des jardins partagés à Montreuil (Seine-Saint-Denis).

 

par Roger Cans

 

Jardin-Montreuil
Les JNE à la découverte d’un jardin partagé à Montreuil, en Seine-Saint-Denis – photo Eric Samson

Nous avons rendez-vous Place de la Fraternité, qui marque la frontière entre Montreuil et Bagnolet (Seine-Saint-Denis). Une place ombragée de platanes, avec des tables de ping-pong en dur et des bancs également en dur, décorés de céramiques méditerranéennes selon un design à la Gaudi. Nous nous retrouvons à une quinzaine dans le premier jardin partagé à visiter. L’entrée est presque monumentale, grâce aux portes en bois fabriquées par l’artiste plasticien Yaya.

 

Sur le mur du grand bâtiment HLM, à gauche, une fresque a été peinte à partir de dessins d’enfants. Et l’on pénètre dans un petit terrain ombragé par les buddleyas et les ailantes de l’ancienne friche. Fleurs et légumes ont été plantés dans des casiers de bois, posés sur des géotextiles qui protègent de la pollution du sol.

 

Nous sommes accueillis par Catherine Pilon, ancienne première adjointe (Verte) de Dominique Voynet, et adjointe aux transports dans la nouvelle municipalité (Parti de gauche). Elle nous explique que la politique des jardins partagés a été lancée à Montreuil en 2008, lorsque le jardin partagé qui se trouvait en face, sur la commune de Bagnolet, a été démantelé pour un projet de construction. La population s’est alors mobilisée pour sauver un chêne-liège, planté là jadis par un habitant revenu des Landes.

 

Une association s’est créée spontanément, appelée Autour du chêne. Et c’est cette association qui a décidé de créer de nouveaux jardins partagés. De l’autre côté de la place, sur la commune de Montreuil, se trouvait justement un terrain vague, laissé en friche après l’incendie d’un hôtel meublé.

 

Les responsables du jardin nous expliquent que la décision de créer dans cette friche un jardin partagé a été prise il y a trois ans par l’association Autour du chêne, qui a signé une convention précaire avec la municipalité. Le terrain, communal, n’est en effet que prêté à l’association, pour une durée indéterminée mais révocable à tout moment. Les bacs en bois sur géotextiles ont été financés par le Conseil de quartier, qui dispose d’un budget fourni par la ville.

 

« Le jardin partagé ne se décrète pas », nous dit-on. « Il faut que la population s’approprie l’initiative et s’y investisse d’une manière ou d’une autre, car les élus ne sont pas très motivés là-dessus ». Exemple de participation : les copeaux de bois étalés sur le terrain et les bacs à compost ont été fournis par une entreprise locale de recyclage de palettes (aujourd’hui fermée : nous ne la visiterons donc pas). Cette entreprise embauchait et formait des Roms qui squattaient la place et sont aujourd’hui installés dans des unités « modulables ». De même, le jardin installé sur le toit-dalle du magasin Décathlon est cultivé par une association de femmes maliennes.

 

Dans ce jardin, les cabanes sont collectives, mais les parcelles plantées individuelles. « Un enfant qui a vu ses premières fraises veut les retrouver le dimanche suivant ». Le jardin est en effet ouvert au public tous les dimanches après-midi, ou lorsque s’y trouve un jardinier (amateur).

 

La difficulté est de faire la part entre le pérenne et le précaire. Curieusement, au fond du terrain, se trouve une parcelle privatisée depuis des années, par un voisin qui a mis son échelle sur le mur. L’association le laisse disposer librement de son bout de terrain enclavé, mais elle y a installé une ruche pour que les enfants puissent s’initier à l’apiculture.

 

Dans un coin du jardin, un enclos de bottes de paille, qui sert à mettre des poules pour quelques heures. De l’autre côté, un abri bâché permet de recueillir l’eau de pluie dans des fûts de plastique. L’arrosage est en effet problématique durant l’été. Heureusement, il y a une fontaine sur la place en cas de pénurie…

 

Nous nous rendons ensuite dans un autre jardin où Yaya construit un abri. Sur un mur : « grève des loyers, crève les huissiers »… Ce jardin s’appelle « Tant qu’on sème » et n’a que deux mois d’existence. Les bacs à fleurs et à légumes (tomates surtout) ont été disposés sur des cartons, pour éviter la aussi la pollution des sols. Au fond du terrain, un escargot géant en bois qui avait été installé place de la Fraternité pour indiquer l’entrée du jardin.

 

De l’autre côté de la rue, on aperçoit les logements modulables (rutilants de couleurs), où ont été réinstallés les Roms qui squattaient la place. Catherine Pilon explique que cette politique courageuse a coûté cher à Dominique Voynet…

 

Notre pérégrination nous fait passer devant une ancienne brasserie en brique reconvertie en centre culturel. Et nous arrivons à la Casa Poblano, un bar restaurant « culturel et solidaire », où se tiendra l’AG, terminée par un repas bio. Cette banlieue proche, recommandée par Thomas Blosseville (NDLR : membre du Conseil d’administration des JNE), est décidément riche d’initiatives à découvrir.