« Regardons le monde » : une table ronde du Green Forum du WWF

Voici la suite de notre série sur le Green Forum du WWF, qui se tient ce 6 octobre 2011 à Paris.

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par Catherine Levesque

Première table ronde : Regardons le monde

La transition écologique de l’économie mondiale, les nouvelles opportunités et emplois associés ; position de la France sur l’échiquier mondial
Animé par Nathalie Croisé
Intervenants :
• Khalida Bouzar, Directrice adjointe du Programme des Nations unies pour l’Environnement – division technologie, industrie et économie
• Philippe Quirion, économiste, chargé de recherche au CNRS

• Thierry Dedieu, secrétaire confédéral en charge des questions européennes pour la Confédération européenne des syndicats et la CFDT

 

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Khalida Bouzar, directrice adjointe du Programme des Nations unies pour l’Environnement

Je pense que la transition écologique va générer des emplois. Dans une étude publiée en début d’année par le PNUE (« Vers une économie verte » :

http://www.unep.org/greeneconomy/), nous montrons notamment que les secteurs de la forêt et des énergies renouvelables seront pourvoyeurs d’emplois.

Mais la lutte contre la pauvreté est essentielle. Quand on a faim, on ne pense pas à la durabilité. Le concept d’économie verte considéré comme un concept du Nord par les pays du Sud, comme une forme de « protectionnisme vert » des pays développés qui imposent des normes environnementales impossibles à respecter pour les pays en voie de développement.

En outre, certains emplois verts ne sont pas décents (ex. recyclage des déchets électroniques sans protection) et la perte d’emplois est inévitable dans certains secteurs comme la pêche.

Il faudra aussi récupérer la baisse des subventions néfastes de l’économie dite « brune » pour des actions de formation.

La crise économique devrait être considérée comme une opportunité de changement. La France, avec la Corée, la Chine et les Etats-Unis, est l’un des pays qui ont dépensé le plus grande part de leur plan de relance économique dans des secteurs verts. Les politiques annoncées jusqu’à 2020 investiront dans le monde 600 milliards de dollars US pour plus de 500 000 emplois créés.

Le rôle primordial revient aux décideurs politiques, mais le financement reposera avant tout sur des investisseurs privés. Quant aux consommateurs et à la société civile en général, ils peuvent largement influer sur la transformation des marchés et l’offre de biens et services.

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Philippe Quirion, économiste au CNRS.

Il a réalisé une étude à partir du scénario Négawatt 2006 (réactualisé depuis, donc son étude va être réactualisée dans quelques mois). Cette étude sur la transition énergétique est surtout basée sur les économies d’énergie et les énergies renouvelables.

 

« Une économie verte lègue aux générations futures des bienfaits plutôt que des fardeaux. Mais il y a des difficultés d’appréhension sur cette notion. Par exemple, en France, certains considèrent que le nucléaire fait partie de l’économie verte, car il limite le réchauffement climatique.

 

Je vois une double régression dans le terme « croissance verte », auquel je préfère la notion de « développement soutenable ». Dans « croissance verte », on élude la question du PIB et on passe souvent sous silence le pilier social du développement soutenable. »
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Thierry Dedieu, Confédération européenne des syndicats et CFDT

Comment répondre au défi du réchauffement climatique soulevé par le GIEC ? Il faut repenser un modèle économique, repenser nos modes de consommation et de production. Une économie verte, sobre en carbone, est incontournable et impérative. Cette transition entraînera des restructurations, nécessitent de la formation, de l’anticipation. Le syndicalisme a un rôle à jouer en ce sens en favorisant le dialogue social.

 

Des emplois verts existent déjà et doivent se développer. Le bâtiment et les énergies renouvelables constituent des gisements potentiels. Certains emplois seront aussi supprimés dans le tourisme, le transport routier… La France doit inscrire son action au sein de l’Union européenne, dont l’engagement est un peu timide en ce moment.

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Interventions de la salle

Pôle emploi

Pôle emploi s’est emparé depuis 2 ans du potentiel d’emplois verts et travaille avec le ministère de l’écologie sur la question. Plusieurs enquêtes auprès des demandeurs d’emploi et des entreprises sur leur positionnement par rapport à l’économie verte dans l’économie réelle.

Depuis trois mois, actions pédagogiques vis-à-vis des demandeurs d’emploi pour les orienter vers les écoactivités qui souffrent d’un déficit d’image et manquent de main d’œuvre (recyclage, gestion des déchets…).

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Représentante de l’association 4D qui anime un collectif Rio + 20 (qui se déroulera en juin 2012 sur le thème de l’économie verte)

Beaucoup d’enjeux en terme de régulation, d’intégration de critères de durabilité…

Nécessité de mieux éduquer

Le scénario Négawatt s’appuie à 30 % sur de la sobriété, donc sur des comportements, qu’il faut éduquer. Quid de la dimension de formation ?

http://www.association4d.org/article.php3?id_article=667

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Thierry Dedieu : attention aux attentes de Rio + 20, qui ne durera que quelques jours. Ayons à l’esprit l’échec de la commission DD des Nations Unies sur les transports cette année, négociations sur le climat décevantes… Maintenons la pression sur les négociateurs mais n’attendons pas de miracle de RIO + 20.

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Khalida Bouzar : avant Rio + 20, réunion alternative et 4 jours dédiés à la société civile. Deux gros programmes éducatifs dans la commission : Consommation durable et tourisme durable.

Rôle des syndicats dans cette transition écologique pour qu’elle soit mieux anticipée par les pouvoirs publics et les entreprises ?

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Thierry Dedieu : les négociateurs sont les représentants des gouvernements selon lesquels nous essayons de peser du mieux que nous pouvons, avec l’aide des ONG. Les pays les plus avancés sont ceux qui ont la plus grande tradition de dialogue social : Allemagne, pays scandinaves, Espagne… Le Grenelle, quoi qu’on pense de ses résultats, a été un progrès en terme de dialogue.

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