Dans le cadre d’un voyage nature* de deux semaines, l’un de nos adhérents eu la chance de visiter le mythique delta de l’Okavango. Ce site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO se trouve au nord du Botswana, un pays un peu plus grand que la France avec seulement 2,6 millions d’habitants, ce qui normalement laisse de la place à la nature sauvage.
par Jean-Claude Génot (écologue)
Le point de départ de ce voyage est la ville de Kasane, située non loin de la frontière avec le Zimbabwe, la Zambie et la Namibie, qui vit essentiellement du tourisme. De là, nous rejoignons un camp où nous dormirons deux nuits dans un lit avant dix jours de bivouac en pleine nature. La piste sableuse qui mène de l’aéroport au camp de Senyati traverse une forêt où les arbres n’ont pas de feuilles. Dans cette région on peut observer les mêmes arbres avec ou sans feuilles, en fleurs ou en fruit, ce qui offre aux animaux une nourriture durant toute l’année. Ce court trajet permet tout de même d’observer une girafe femelle (reconnaissable aux touffes de poils bien visibles sur ses cornes alors que les mâles qui s’affrontent en ont nettement moins, voire pas du tout), un raphicère champêtre qui ressemble à un chevreuil avec de longues oreilles et de nombreux indices de présences d’éléphants (crottes, ossements et traces sur la végétation).
Le campement est composé de maisons et d’emplacements pour les véhicules équipés de tentes. Deux mares alimentées par des pompes attirent de nombreux animaux car nous sommes en fin de saison sèche qui dure de mai à octobre. Le spectacle est permanent toute la journée et même la nuit : éléphants, buffles, grand koudous, impalas, phacochères, babouins, chacal à dos noir et l’hippotrague, magnifique antilope à la robe noire pour les mâles et brune pour les femelles, rare à cause de la chasse pratiquée autrefois pour ses cornes spectaculaires. Une famille de mangoustes rayées occupe le camp ; elles fouinent sans cesse en se déplaçant à la recherche de nourriture dans les crottes d’éléphants, dans le sol ou en attrapant des papillons. Les oiseaux ne sont pas en reste et la liste grimpe vite à une trentaine d’espèces en moins d’une journée. Les calaos à bec rouge sont aussi peu farouches que chez nous les moineaux, mais il y aussi des moineaux tisserin à sourcils blancs omniprésents qui font des nids ébouriffés sur les acacias. Pas d’ambiance africaine sans les pintades et les francolins à bec rouge qui courent dans tous les sens et le chant de la tourterelle du Cap en musique de fond. Près des mares, s’agitent des échasses banches, des vanneaux forgerons, des chevaliers et des gravelots à triples bandes. Dans le ciel tournoient les vautours à dos blancs, le milan noir et l’aigle bateleur parmi les rapaces. Les propriétaires du site ont creusé un souterrain qui donne sur une des mares au ras du sol et on y accède par un escalier assez raide. On y voit par-dessous les imposantes femelles éléphants à quelques mètres avec leurs jeunes de tous les âges. Ce camp permet déjà d’observer un nombre impressionnant d’espèces alors que nous ne sommes pas encore dans une aire protégée, c’est un des privilèges du Botswana.
Avant d’arriver dans le delta proprement dit, la visite du parc national de Chobe s’impose car le premier parc national du Botswana couvre 10 590 km2 et fait partie des plus riches d’Afrique pour ses concentrations d’animaux sauvages. Le Chobe est le nom de la partie inférieure de la rivière Kwando qui vient d’Angola et se jette dans le Zambèze en Zambie. En cette saison sèche, il suffit de longer les berges de cette rivière qui marque la frontière avec la Namibie pour observer l’abondance de la faune liée à cette vaste zone humide en milieu aride. Les oiseaux d’eau sont nombreux (cigognes à bec ouvert et à bec jaune, ibis falcinelle et sacré, aigrette à bec jaune, grande et petite aigrette, aigrette noire, crabier chevelu, marabout, spatule, canard à bec rouge, oies de Gambie et d’Egypte, cormoran africain, anhinga d’Afrique, vanneau à tête blanche, chevalier guignette et autres limicoles, martin pêcheur pie, pélican blanc, jacana).
La rivière est peuplée d’hippopotames et de crocodiles du Nil. Les rares arbres au bord de l’eau servent de perchoirs aux nombreux aigles pêcheurs. Partout des groupes d’éléphants, de zèbres, de buffles et de girafes vont s’abreuver dans cette rivière. Les lions ne sont jamais loin, ainsi trois mâles ont été observés en une matinée : un groupe de deux jeunes frères à la crinière naissante et un animal seul plus âgé à la crinière bien fournie, le ventre plein. Ils ont la réputation de chasser les jeunes éléphants, ce qui se vérifiera sur le terrain dans le sud du Parc.
Il suffit de quitter cette plaine inondable pour circuler dans des savanes plus ou moins boisées et des forêts plus ou moins éclaircies par les éléphants. Il reste des vestiges de scieries qui ont servi à l’exploitation du bois au XXe siècle jusque dans les années 1970. Tous les habitats naturels du parc sont la résultante des interactions entre les activités humaines plus ou moins anciennes (chasse, pêche, cueillette, coupe de bois, élevage, culture), les populations animales, la nature des sols et le climat avec alternance d’une saison sèche et d’une période d’inondations. Que ce soit par les anciens usages anthropiques, l’impact des fortes densités d’éléphants – 50 000 dans Chobe (1) – et les incendies, la forêt est un des écosystèmes les plus fragiles. Ce n’est sans doute pas un hasard si le parc national est encadré de trois réserves forestières où il est interdit de faire du feu, de couper du bois ou d’y faire pâturer des animaux domestiques. On a d’ailleurs traversé celle de Chobe (1 545 km2) par une piste très ensablée et chaotique. Elle m’a paru pauvre en gros arbres – une étude (2) montre que cette forêt possède à peine 5 % d’arbres de plus de 50 cm de diamètre contre 64 % entre 10 et 30 cm de diamètre -, mais avec pas mal de régénération et beaucoup d’arbres morts (60 % au total selon la même étude et sur les 40 % restants, 16 % ont été blessés par le feu ou par les éléphants). La nuit au bord du Chobe est animée par les cris de chacal et les rugissements de lion. Un matin, notre campement a eu la visite furtive d’un ratel, ce blaireau africain généralement nocturne.
Le voyage se poursuit vers Savuti, secteur au sud-ouest du parc national de Chobe où dominent des savanes, des prairies et quelques rares collines facilement repérables dans l’immensité plate de ce haut plateau volcanique. Toute la vie s’organise autour des mares alimentée en eau : groupe d’éléphants prenant un bain de boue, troupeau de gnous s’abreuvant, lionne gestante étanchant sa soif. Non loin d’une mare, gît la carcasse d’un jeune éléphant tué par quatre lions qui font la sieste sous un arbuste. Notre campement est occupé par des mangoustes naines qui inspectent tous les cachettes possibles. Les éléphants sont tellement attirés par l’eau que le bloc sanitaire est entouré d’un haut mur en béton. Durant la nuit, au chacal et au lion s’ajoutent les rires d’une hyène et les barrissements d’éléphants. Le lendemain, la carcasse de l’éléphant est toujours consommé par un des lions de la veille entouré de six chacals qui attendent patiemment que le lion s’en aille pour avoir leur part du festin. Dans les vastes étendues de savane et de prairie, nous croisons les outardes kori et à ventre noire, une mangouste jaune, des autruches mâles (plumage noir), des perdrix des sables et deux calaos couronnés. De grandes surfaces sont occupées par une sauge toxique, ce qui explique qu’elle n’a pas de mal à s’étendre malgré tous les herbivores présents. De gros acacias à girafe (camel thorn en anglais) à l’écorce épaisse trônent de façon majestueuse bien adaptés aux sols secs et sablonneux. Les forêts de mopane aux feuilles en forme de papillon sont omniprésentes avec plus ou moins d’impacts des éléphants. Un groupe de sassaby, une antilope de grande taille, ajoute une nouvelle espèce à la liste déjà imposante des herbivores vivants dans ces écosystèmes. Décidément, la carcasse du jeune éléphant tué par des lions est rentable puisque le surlendemain de sa découverte, elle nourrit cette fois une lionne accompagnée de ses trois lionceaux âgés de deux mois. Elle mange tandis que les petits s’amusent, se poursuivent et s’attrapent dans des jeux incessants qui sont en réalité un apprentissage de leur future vie de prédateur. Avant de quitter Savuti, grâce à l’information de locaux croisés sur la piste, nous observons un guépard mâle couché à l’ombre. Ce prédateur ultra-rapide est fragile car s’il tue une proie, l’effort déployé dans sa course l’oblige à récupérer avant d’entamer sa proie, et c’est ce moment-là que peuvent choisir d’autres prédateurs pour s’emparer du butin.
Enfin, en atteignant la réserve de chasse de Moremi, nous entrons dans le delta de l’Okavango (28 000 km2). Moremi (3) est classée en zone de nature sauvage par l’UICN et couvre environ 5 000 km2. Cette réserve est spécifique en tant qu’aire protégée puisque ce sont les habitants (Bochiman) qui l’ont créée et qui gèrent les campements pour les touristes. Nous visitons la zone traversée par la rivière Khwai, un des nombreux cours d’eau du delta qui se jette dans la mer de sable du Kalahari. A partir de maintenant, le paysage sera moins aride car la rivière, ses îles et son parcours sinueux génèrent un large couloir vert fait de zones humides, de marais à papyrus et de forêts riveraines. Lors des inondations, certains cours d’eau changent de lit et inondent des forêts dont tous les arbres meurent. Il faut survoler le delta pour se rendre compte de son immensité, c’est une mosaïque diversifiée entre milieux humides et arides, un véritable labyrinthe d’îles, de canaux et de lagunes. Au sol, le paysage est ponctué de nombreux arbres à saucisses, prisés par les léopards pour y hisser leurs proies. Nous verrons une jeune femelle et un mâle au cours de notre séjour. De nouvelles antilopes sont présentes et en plus du cobe à croissant, on croise souvent les cobes des roseaux et les cobes lechwe et bien sûr l’ensemble des herbivores déjà présents à Chobe (buffle, éléphant, impalas, phacochère, girafe, gnou, zèbre). Les palmiers sont visibles de loin et partout où l’on porte le regard des centaines de termitières se dressent seules ou au milieu de la végétation, dont certaines ressemblent à des gratte-ciels futuristes.
Au premier campement en bordure de la rivière, la nuit à peine tombée provoque le concert des grenouilles à clochettes et bien plus tard, ce sera le tour des hyènes, des lions et des hippopotames dans un tout autre registre vocal. En journée, les éléphants traversent paisiblement à quelques mètres des tentes. Au second campement à côté d’un marais, l’activité animale est maximale. En journée : vervet venu voler une orange, écureuils courant sur les troncs puis visite du perroquet de Meyer et du pic de Bennet sur les arbres à saucisses et l’ébène qui surplombent nos tentes. A la tombée de la nuit, une hyène tachetée au pelage hirsute vient rôder à quelques mètres de notre table et un hippopotame sort du marais pour traverser le campement. Dans la nuit, deux éléphants passent devant notre tente et font du bruit dans la végétation. Parmi les espèces plus rares observées en journée : un couple d’otocyan, ce renard aux oreilles de chauves-souris, surpris au petit matin et une seconde belle rencontre avec un ratel, réfugié sous un arbuste qui a fini par sortir à découvert avant de disparaître dans les buissons. Dans le delta de l’Okavango, de très nombreuses espèces ont été identifiées : 1 300 plantes, 71 poissons, 33 amphibiens, 64 reptiles, 444 oiseaux et 122 mammifères (4). Notre séjour nous a permis d’observer et d’identifier un quart des oiseaux et des mammifères. Cette incroyable diversité est la conséquence d’un milieu naturel unique, avec des changements dynamiques dans les régimes d’inondation qui, à leur tour, entraînent des changements dans les successions végétales et les animaux qui en dépendent. Les variations temporelles des inondations provoquent également l’accumulation et la mobilisation de nutriments qui sont facilement utilisés par les espèces végétales bien adaptées. Il en résulte une productivité biologique localement élevée, qui se traduit à son tour par un grand nombre de mammifères herbivores.
Sapiens entretient l’illusion tenace qu’il améliore la nature et que celle-ci n’existe que si elle est modifiée par lui et garde son empreinte. Comme le souligne François Terrasson dans son livre culte La peur de la nature : « Il y a là une volonté active d’attaquer tout ce qui pourrait échapper au contrôle humain ». L’Okavango apporte un démenti à cette arrogance humaine en démontrant que la nature livrée à elle-même, avec du temps et de l’espace, est capable de créer une extrême diversité végétale et animale. Cette extraordinaire diversité du vivant est liée à la conjugaison de facteurs abiotiques dont le changement s’inscrit dans le long terme (climat, nature des sols) et de facteurs écologiques dynamiques dont le changement est permanent (feu, inondation, herbivorie, prédation). La distribution de la végétation est liée à la hauteur et à la profondeur de la nappe aquifère, à la distance par rapport à une source et également à la composition chimique de l’eau et celle du sol, notamment la concentration en sodium (5). Le feu est un phénomène qui modèle la nature à l’échelle du paysage. Les feux d’origine humaine ont une fréquence plus importante que ceux d’origine naturelle. Les principaux changements sont observés dans la structure de la végétation, comme la hauteur et la couverture de la strate herbacée ou la production de biomasse. Peu de plantes tirent profit des feux uniques. Les milieux réagissent différemment aux incendies. Ainsi il y a une diminution de la biomasse dans les plaines d’inondation et une augmentation dans les forêts sèches de mopane. Les apports de nutriments après les incendies semblent améliorer les conditions nutritives dans les habitats les plus pauvres (forêts sèches), tandis que pour les sites plus productifs (plaine inondable), l’amélioration de la disponibilité des nutriments après le brûlage semble mineure (6). De plus, la fréquence des incendies est plus élevée dans les plaines d’inondation que dans les zones arides en raison d’une production de biomasse et d’une charge de combustible plus importantes. Le potentiel d’incendie le plus élevé est constaté pour les plaines qui sont inondées environ tous les deux ans (7). Les rivières du delta et les inondations véhiculent des milliers de tonnes de sédiments qui modifient la nature des sols et la topographie des lieux et créent des zones humides temporaires ou permanentes profitant à tout un cortège d’espèces adaptées.
Les herbivores façonnent la végétation par leur action de pâturage et de broutage. Certains arbustes sont ainsi « taillés » par les impalas à un mètre du sol tandis que les girafes agissent à leur hauteur pour rabattre la végétation. Ces mêmes girafes taillent la base du feuillage des arbres à saucisses. L’éléphant en tant que méga-herbivore a un impact significatif sur les milieux. Il lui faut quotidiennement entre 150 et 180 kg de nourriture en saison sèche, et entre 200 et 260 kg en saison des pluies, ainsi que 140 litres d’eau par jour. C’est pourquoi il se déplace 20 heures sur 24 pour se nourrir et se rendre aux points d’eau. Les éléphants mangent de l’herbe dans le Kalahari aussi longtemps qu’elle est disponible, puis consomment sélectivement les plantes ligneuses. Ils agissent comme des « espèces architectes » qui créent, améliorent et maintiennent l’hétérogénéité de la végétation à des échelles variables, de la pousse individuelle dans un couvert végétal aux populations d’arbres au niveau du paysage (8). Mais en cas de fortes densités, la consommation de branches, d’écorces, de feuilles et de bois sec affecte la composition des forêts, notamment en arbres matures, réduit leur densité et leur richesse spécifique au niveau local, mais pas au niveau global. Ainsi la forêt riveraine du Chobe, présente au début du XXe siècle quand les populations d’éléphants étaient au plus bas à cause de la chasse pour l’ivoire, a entièrement disparu quand les populations ont augmenté (9). La couverture de la végétation boisée a diminué de 60 % à 30 % entre 1962 et 1998, tandis que la végétation arbustive a augmenté de 5 % à 33 % au cours de la même période. Au cours de la période étudiée, les forêts se sont progressivement éloignées du front de la rivière. Alors que la forêt riveraine couvrait une zone continue le long du front de rivière en 1962, il n’en restait que des fragments en 1998.
Aujourd’hui, le Botswana possède la plus grande population d’Afrique avec 130 000 éléphants (10) (les évaluations se font selon des protocoles de comptage par avion). Le gouvernement actuel aurait des velléités de réduire les effectifs, mais cette question de la régulation des éléphants est un débat qui existe depuis une vingtaine d’années et qui pose un certain nombre de problèmes comme le fait que ces éléphants du nord Botswana font partie d’une population régionale transfrontalière (Angola, Namibie, Zambie et Zimbabwe) (11) et qu’il est hasardeux de croire qu’on peut réduire les effectifs d’éléphants du nord du Botswana sans que d’autres éléphants puissent venir les remplacer. La prédation par les lions n’a pas d’effet significatif sur les populations d’éléphants ; celles-ci sont soumises au phénomène de densité-dépendance qui veut qu’en cas de fortes densités, la mortalité est plus forte, la natalité plus faible et la dispersion des animaux vers d’autres territoires plus importante (12). La population humaine du pays est faible mais très rurale, d’où des conflits dès que les animaux sortent des aires protégées, ce qui entraîne des actes de braconnage. Le parc national de Chobe est bordé au nord et à l’est par des fermes d’élevage et jouxte la ville de Kasane où les éléphants traversent souvent les routes. Ils se déplacent beaucoup, notamment entre le Zimbabwe et le Botswana, et il est impossible pour eux de rester uniquement dans les zones protégées lors de ces déplacements. Le delta est également en contact avec des zones d’élevage, ce qui génère des conflits pas seulement avec les éléphants mais aussi avec les prédateurs. A l’inverse, l’élevage bovin fait reculer la forêt (13) dans le delta où l’ensemble du site ne bénéficie pas d’une protection. On le voit avec cet exemple, conserver des fortes populations de méga-herbivores est un défi dans un monde où l’humain est omniprésent avec d’un côté, des conflits dès que ces animaux quittent les aires protégées et de l’autre, une pression écologique forte sur certains écosystèmes. Cela doit nous donner à réfléchir dans le contexte actuel où se développent de nombreuses expériences et projets de ré-ensauvagement avec des grands herbivores comme le bison d’Europe pour retrouver une situation identique au début de l’Holocène, époque où, contrairement à aujourd’hui, l’homme faisait partie des écosystèmes en tant que prédateur.
Et nous touristes, quel est notre impact sur ce milieu ? Certes, on ne peut pas parler de sur-tourisme dans l’Okavango comme on le voit dans certaines villes et hauts lieux culturels mais une étude (14) menée en 2018 dans le parc national de Chobe par des chercheurs locaux montre que la fréquentation touristique a augmenté de 28 % entre 2009 et 2015 pour atteindre 240 000 visiteurs. Les effets négatifs de cette fréquentation sont les suivants : encombrement des véhicules et des bateaux, creusement des pistes, nuisance sonore des bateaux sur le Chobe, pollution de l’air et de l’eau, dérangement de la faune et production de déchets. Tous ces facteurs réduisent fortement la satisfaction des touristes interrogés lors de cette étude. Si elle est représentative des réponses aux enquêtes auprès des touristes, ces derniers viennent majoritairement des Etats-Unis, d’Afrique du Sud et d’Australie. Les Américains et les Australiens apprécient les espaces sauvages pour en avoir encore chez eux ,mais s’ils viennent au Botswana, c’est parce qu’ils trouvent dans les espaces sauvages africains, ce qu’ils n’ont pas chez eux, à savoir l’abondance de la faune. Les Africains du Sud sont des voisins du Bostwana qui aiment la brousse et sont équipés pour y séjourner, mais souvent avec trop de confort et des comportements pour le moins peu respectueux comme de laisser tourner leur moteur en observant la faune pour profiter de la climatisation de leur véhicule (observation faite sur le terrain).
On ne peut pas terminer ce tour d’horizon de l’écologie globale du delta sans parler des termites. On comprend que les éléphants, vue leur taille, façonnent la nature autour d’eux, mais on oublie souvent le rôle important des minuscules termites, véritables ingénieurs du sol comme les vers de terre. Parmi leurs nombreuses fonctions : décomposition de la litière, maintien de la structure du sol, facilitation du stockage de l’eau, contrôle de la diversité microbienne, protection des plantes contre les maladies et les pathogènes. Les termitières sont des îlots de fertilité qui fournissent aux plantes des nutriments (azote minéral)(15). Les termitières abandonnées servent également de gîte à de nombreuses espèces qui en font leurs terriers. Finalement, les termites sont nécessaires à la santé des sols tropicaux, une belle leçon d’écologie fournie par la nature…
* Ce voyage nature a été effectué avec African Escapades, un tour opérateur artisanal présenté dans un précédent article pour les JNE https://jne-asso.org/blogjne/2015/11/17/un-exemple-reussi-decotourisme-artisanal/
(1) https://fr.wikipedia.org/wiki/Parc_national_de_Chobe
(2) (PDF) Disparition d’arbres indigènes polyvalents dans les réserves forestières de Chobe et de Kasane au Botswana (researchgate.net)
(3) https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9serve_de_chasse_de_Moremi
(4) https://link.springer.com/article/10.1007/s00027-006-0857-y
(5) https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1365-2028.1993.tb00526.x
(6) https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S025462991530168X
(7) https://link.springer.com/article/10.1007/s10980-005-5243-y
(8) https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=OI5PAwAAQBAJ&oi=fnd&pg=PT9&dq=+woodland+ecosystems+in+Chobe+National+Park+&ots=qFQlNUPPQ5&sig=utquWiE1xlWXqRD1u4qMC8DgG_s&redir_esc=y#v=onepage&q=woodland%20ecosystems%20in%20Chobe%20National%20Park&f=false
(9) https://www.wiley.com/en-ca/Elephants+and+Savanna+Woodland+Ecosystems%3A+A+Study+ from+Chobe+National+Park%2C+Botswana-p-9780470671764
(10) https://adf-magazine.com/fr/2023/05/les-pays-dafrique-australe-effectuent-un-recensement-des-elephants/
(11) https://pachydermjournal.org/index.php/pachyderm/article/view/865/844
(12) https://library.wur.nl/ojs/index.php/Botswana_documents/article/view/15966
(13) https://digitalcommons.du.edu/ucol_epm/93/
(14) https://journals.ub.bw/index.php/pula/article/view/1526
(15) https://noe.org/les-termites-ravageurs-ou-ingenieurs#:~:text=des%20fonctions%20%C3%A9cologiques%20importantes&text=Elles20sont%2C%20au%20m%C3%AAme%20titre,le%20sol%20en%20mati%C3%A8re%20organique
Photo du haut : dans l’Okovango, un lion à côté de la carcasse d’un jeune éléphant © J.C. Génot