Six nouveaux réacteurs nucléaires en France, est-ce pertinent ? Eclairage avec Anita Villers (photo ci-dessus), de l’association EDA (Environnement Développement Alternatif) basée à Lille, engagée sur la question depuis 1990.
par Anne Henry-Castelbou
La question se pose d’un point de vue écologique et géopolitique, et ce d’autant plus avec la crise ukrainienne. Le 10 février dernier, le président de la République annonçait la création de six nouveaux réacteurs nucléaires EPR2, ainsi que huit autres à l’étude, soit un budget global de 50 milliards d’euros. Ces réacteurs EPR (European Pressurized Reactor) de nouvelle génération, de 1600 mégawatts chacun, viendraient remplacer d’anciennes tranches de différentes centrales de France, dont Gravelines dans les Hauts-de-France. Cette nouvelle génération de réacteurs a l’avantage d’être plus efficace, d’être équipée d’enceintes en béton plus épaisses et de permettre des opérations de maintenance sans arrêter l’ensemble de l’installation.
Ce projet est porté par les communautés politiques et économiques locales comme dans le Dunkerquois. Il faut dire que la centrale de Gravelines concerne 2000 emplois directs et des retombées fiscales qui atteignent près de 130 millions d’euros de taxes et d’impôts reversés chaque année par EDF. Qui plus est, les projets d’énergie verte de la côte d’Opale autour du parc éolien offshore, de la décarbonation d’Arcelor Mittal ou de la production d’hydrogène nécessitent de vraies capacités de production d’électricité stable.
Un projet sans débat public
Mais les associations environnementales comme EDA (Environnement Développement Alternatif) sont très sceptiques, comme le souligne Anita Villers basée à Lille, engagée sur ces questions depuis 1990 et participant régulièrement à des échanges avec l’ASN (Autorité de sureté nucléaire).
« Ces réacteurs ne sont pas nécessaires au vu des risques que cela implique, au vu du temps qu’il faudra pour les mettre en place, et au vu de l’approvisionnement en uranium », explique-t-elle. Un approvisionnement qui ne ferait que renforcer notre dépendance à la Russie. Sans parler d’une communication qui s’est faite à la va-vite : « Le président Macron, une fois qu’il a eu l’assurance qu’il recevra des fonds européens, s’est empressé de faire l’annonce. Nous n’avons eu aucune communication en amont au niveau de l’ASN. Mais tout le monde a été surpris ; il n’y a pas eu de débat et on peut le regretter. Ce n’est pas démocratique. »
Et en temps de guerre, comme actuellement en Ukraine, ces centrales ne sont pas taillées pour supporter des attaques de missiles ou des tirs accidentels. L’autre risque est l’instabilité électrique générée par un conflit qui pourrait perturber le refroidissement des réacteurs et des piscines.
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Photo du haut : Anita Villers © Anne Henry