Voici un compte-rendu du débat sur le projet de Parc national des Calanques organisé par les JNE le 6 mai dernier à la Maison de l’Europe et des Associations de Cassis, dans les Bouches-du-Rhône.
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par Roger Cans
Certains des intervenants invités ont dû se rendre à Marseille sur injonction du maire Jean-Claude Gaudin, afin justement de discuter de l’affaire. Mais ils sont remplacés, de sorte que nous avons trois partisans du parc (URVN, CAF et Mountain Wilderness) contre trois adversaires (les amis de la rade de Marseille, le représentant des cabanonniers et un viticulteur).
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Notre présidente, Carine Mayo, ouvre la séance et demande d’abord au directeur du GIP (Groupement d’intérêt public) des Calanques, Jean-Marie Lafond, de présenter le projet de parc. Le projet est déjà bien avancé puisque, le 11 février 2011, l’assemblée générale du GIP a approuvé quatre délibérations (charte, réglementation, périmètres et gouvernance). Le futur parc prévoit un « cœur » de 8430 hectares terrestres et 42570 hectares marins, dont 4570 hectares de « non prélèvement » (pêche et chasse sous-marine interdites). L’aire d’adhésion des communes approche les 10000 hectares. L’aire maritime adjacente, qui correspond en mer à l’aire d’adhésion, s’étend sur près de 150000 hectares. Une présentation complétée par l’intervention de François Fouchier, délégué régional du Conservatoire du littoral.
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Carine Mayo donne ensuite cinq minutes à chaque intervenant pour expliciter sa position. Béatrice de Crozet, qui représente en même temps les amis de la rade de Marseille et le Comité écologique de sauvegarde de la Ciotat, en profite pour faire une charge au canon contre le parc, et même contre l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature, qui serait liée au grand capital… Une charge inspirée d’un papier de Médiapart très mal inspiré.
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Pierre Aplincourt, le président de l’URVN (Union régionale Vie et Nature) contre-attaque au nom d’un long combat contre le bétonnage de la Côte d’Azur. Le représentant des cabanonniers, lui aussi, s’en prend au projet de parc, susceptible d’interdire beaucoup de choses et donc de bouleverser la vie de ceux qui ont choisi d’habiter leurs cabanons au fond des calanques. Le représentant du CAF (Club alpin français), Bernard Hamel, reconnaît que les grimpeurs se sont d’abord méfiés des règles qui allaient interdire certaines voies d’escalade. Mais, comme dans les autres parcs nationaux, les alpinistes s’accommodent finalement très bien des règles de protection.
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Un vigneron de Roquefort-la-Bedous, donc en zone d’adhésion, se déclare inquiet de voir se créer un parc à sa porte, alors même qu’il cultive déjà en bio et même en biodynamie. Pourra-t-il seulement profiter du label « parc » ? Au nom de Mountain Wilderness, une association internationale créée par des alpinistes italiens, bientôt rejoints en France par Haroun Tazieff, François Labande explique qu’il habite Marseille, mais est toujours dans le conseil d’administration du parc des Ecrins. A ce titre, il a vu les préventions manifestées par les locaux contre tout projet de protection, puis ces préventions tomber, et enfin leur adhésion complète aujourd’hui. Ce sera pareil pour les calanques.
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Notre secrétaire général Roger Cans anime alors le débat entre les intervenants et la salle. On apprend ainsi que les cabanonniers, qui ne seraient plus que 120 ou 130 à disposer du droit de stationnement, permettent en fait à des centaines de gens de stationner leur voiture et d’encombrer les calanques. « On est à Marseille », où les passe-droits fleurissent. Le viticulteur n’est pas opposé par principe au parc national, mais il craint une nouvelle couche de réglementations, alors qu’il croule déjà sous les contrôles.
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D’une manière générale, les anti-parcs expliquent que les calanques sont bien gardées, même sans le parc. Déjà, en 1910, les Marseillais s’étaient mobilisés contre l’exploitation des carrières par le groupe belge Solvay, qui transformait le calcaire en chaux. Les pro-parcs, eux, estiment que la pression touristique est telle aujourd’hui que seul un parc national peut sauver ce qui peut encore l’être et limiter les dégâts de la surfréquentation.
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Le mot de conclusion sera laissé à Christian Desplats, ancien du Conservatoire du littoral et aujourd’hui responsable de l’ARPE (Agence régionale de protection de l’environnement). Il a expliqué que le site des calanques, trop petit pour être désigné parc national, n’avait pu l’être qu’avec son extension marine qui, elle, est vaste et rejoint le projet Pelagos de protection des cétacés entre Monaco, Gênes et Bonifacio. En fait, on aurait pu aussi bien faire une opération Grand Site, comme à la Pointe du Raz ou à la dune du Pilat, où cela permet de limiter la fréquentation. Mais, à la suite de plusieurs manifestations avec pancartes et banderoles, c’est le projet de parc national qui l’a emporté.
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