Il est faux de dire que tout le monde ou personne – c’est pareil – est responsable de l’effondrement à venir. « Les coupables existent, leurs crimes ont des mobiles, et le temps est venu de nous mettre en colère. » Contre qui ? « Les actionnaires de cette fabuleuse civilisation techno et thermo-industrielle capitaliste libérale qui ne nous a tirés du Moyen-Âge que pour nous renvoyer à la barbarie, si ce n’est au néant. » Les voilà nommés. Alors que faire ? Gueuler. Agir. Désobéir. Après avoir compris pourquoi on se trouve encore tant d’excuses pour ne rien faire… « On » étant les personnes aux manettes et leurs acolytes : industriels, politiques, médias, publicitaires, mais pas seulement : c’est nous aussi, qui ne les avons pas déboulonnés depuis longtemps, ces « effondreurs ». « Sommes-nous devenus un vaste troupeau de consommateurs résignés ? » …
Éric La Blanche espère réveiller la colère du lecteur avant que d’autres colères, immenses, brutales et désespérées, ne se déclenchent : « celle des masses planétaires, lorsqu’elles réaliseront qu’on les a sacrifiées au bénéfice exclusif d’une petite oligarchie de richissimes salopards et qu’elles n’ont malheureusement plus rien à attendre du futur. » « Faisons peur au pouvoir, il ne comprend que ça. »
C’est enlevé, drôle, clair, documenté et ça dit la vérité « nue et dégueulasse » (cf page 97, j’adore). Un sacré paquet de responsables en prend pour son grade, je ne vais pas les lister tous, mais ils ne sont pas innombrables et il faut les chasser de la décision publique. Mon préféré : le publicitaire qui « bosse au ministère de la propagande de la catastrophe ». Et bien sûr les 1%. Les 0,5% de la population mondiale qui rejettent 14% des émissions de CO2 (soit 4 points de plus que la moitié la plus pauvre de l’humanité). Et chez nous, c’est la curée : « en France, chaque personne appartenant aux 1% les plus riches émet plus de 200 tonnes de gaz à effet de serre par an, contre 11 par personne en moyenne. »
Éric La Blanche tord le cou à quelques idées reçues, comme celle qui affirme que ça ne sert à rien de taxer les riches, ils ne sont pas assez nombreux… « faire renoncer les multimilliardaires à leurs jets privés serait plus efficace qu’augmenter les taxes environnementales » : les gilets jaunes ont raison. « Taxer les gros héritages, représentant 189 milliards $ en 2017 pour 44 héritiers, permettrait de dégager des fonds conséquents pour lutter contre la crise climatique ». En bref, « les politiques de réduction des émissions de carbone feraient mieux de viser le haut de l’échelle sociale plutôt que de se focaliser sur les plus pauvres à l’autre bout » (c’est la revue Nature qui l’explique en 2019). Comme celle de la théorie du ruissellement, qui est une infox : « personne ne l’a jamais étudiée et on ne lui a jamais trouvé d’auteur ».
« J’espère que je vous ai regonflés », conclut-il : oui, merci (j’avoue que je suis aussi regonflée par la liste de fin d’ouvrage, qui est mienne depuis pas si longtemps que ça). J’ai décidé d’offrir ce livre à Noël (je n’achète plus, je couds les cadeaux : ce sera une exception pour la bonne cause), en espérant faire réfléchir et… ruisseler.
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Éditions Delachaux et Niestlé, 334 pages, 18,50 € – www.delachauxetniestle.com
Contact presse : Julia Bocquin. Tél. : 07 61 74 35 45 – jbocquin@lamartiniere.fr
(Christel Leca)
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