Paris, le 27 février 2020
Copie : M. le Ministre de l’Intérieur, Mme la Ministre de la Transition Ecologique et Solidaire, M. le Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation
Dissoudre la cellule Demeter est indispensable pour apaiser les relations avec le monde paysan
Monsieur le Premier ministre,
Nous avons pris connaissance de la mise en place de la Cellule Demeter, cellule nationale de suivi des atteintes au monde agricole, ainsi que ses déclinaisons territoriales. Après analyse des fondements et des objectifs de cette cellule, nous vous demandons instamment la dissolution de cette structure.
La présentation de l’état des agressions affectant les exploitants agricoles est un constat que nous ne pouvons que déplorer. Face à ces infractions, il est du devoir des services de l’Etat d’assurer la protection des citoyens, de tous les citoyens. Par contre, nous ne pouvons admettre qu’une profession, quelle qu’elle soit, puisse bénéficier de dispositions spécifiques. Le principe constitutionnel souligné par la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789 affirme que la Loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle punisse, soit qu’elle protège ». Aussi dénonçons-nous vivement que des moyens publics soient mis à la disposition préférentielle d’une branche professionnelle. Cette inégalité représente une injure pour les autres populations qui ne bénéficient pas des mêmes services spécifiques. Tous les citoyens doivent être traités de façon équitable.
Le périmètre d’activité de cette cellule constitue un autre sujet de questionnement. S’il est bien dans la mission des services du ministère de l’Intérieur de prévenir toute action pouvant conduire à la destruction, ou au vol de matériels, nous ne pouvons pas admettre que le domaine soit étendu à des « actions de nature idéologique, qu’il s’agisse de simples actions symboliques de dénigrement du milieu agricole (…) », comme vous l’annoncez dans le dossier de presse de création de cette cellule, mention dont le caractère général peut générer un usage extensif. Certaines organisations professionnelles s’en servent déjà pour mettre en cause ceux qui documentent et dénoncent les impacts de l’agriculture industrielle, voire mobilisent les citoyens par des moyens légaux. Par cette assertion, la création de cette cellule vise à criminaliser l’expression d’une opinion, ce qui est en contradiction avec le principe fondamental de liberté d’opinion, autre principe de base de notre République.
Les organisation signataires agissent en permanence pour accompagner et soutenir la transition agro-écologique, que nous avons toujours défendue dans toutes les instances concernées et en soutien permanent aux agriculteurs et à leur santé, à l’instar de centaines de milliers de citoyens qui dénoncent les dégâts de l’agriculture productiviste sur la santé, l’eau, les sols, la biodiversité, l’air et le climat. Les démarches de nos organisations s’inscrivent toujours dans un cadre légal et non violent, dans une démarche de défense de l’intérêt général.
Néanmoins nous constatons que les agressions se multiplient contre les défenseurs de la nature. Nous avons alerté la ministre de la Transition Ecologique et Solidaire sur ce sujet, qui nous a répondu en renvoyant au cadre légal commun. Aussi sommes-nous étonnés qu’une tout autre réponse ait été apportée à des représentants de la profession agricole.
Par ces éléments factuels, nous dénonçons donc la mise en place de la cellule Demeter qui met à disposition des moyens publics au service d’une profession, de façon discriminatoire, et par la présente vous demandons sa dissolution.
Cécile Ostria, directrice générale de la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme
Gérard Caussimont, président du Fonds d’Intervention Eco Pastoral
Hughes Ferrand, président de La Garance Voyageuse
Alexandre Gannier, président du Groupe de Recherche sur les Cétacés
Bernard Chevassus-au-Louis, président de Humanité & Biodiversité
Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue pour la Protection des Oiseaux
Malik Salemkour, président de la Ligue des Droits de l’Homme
Rémi Luglia, président de la Société Nationale de Protection de la Nature
Agnès Michelot, présidente de la Société Française du Droit de l’Environnement
Isabelle Autissier, présidente du WWF
Benjamin Sourice co-président de Combat Monsanto
Eric Feraille, président de FNE Auvergne-Rhône-Alpes
Hervé Bellimaz, Président de FNE Bourgogne- Franche-Comté
Jean-Luc Toullec, président de FBNE
Samuel Senave, président de FNE Centre-Val de Loire
Pascale Combettes, président de FNE Grand Est
Thierry Dereux, président de FNE Hauts-de-France
Muriel Martin-Dupray, vice-présidente de FNE Ile-de-France
Simon Popy, président de FNE Languedoc- Roussillon
Thierry de Noblens, président de FNE Midi-Pyrénées
Joël Gernez, président de FNE Normandie
Isabelle Loulmet, présidente de FNE Nouvelle- Aquitaine
Jean-Christophe Gavallet, président de FNE Pays de la Loire
Gilles Marcel, président de FNE PACA
Klaus Waldeck, président de Poitou Charentes Nature
Direction collégiale d’U Levante
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