Voici la réponse d’Allain Bougrain Dubourg à la tribune de Roger Cans mise en ligne ici sur notre site.
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Cher Roger,
Comme toi j’aime les oiseaux et j’aime aussi les éoliennes. C’est pourquoi ton billet d’humeur intitulé un « coup » de la LPO (sic) ne me parait ni fondé, ni argumenté.
J’ai suffisamment plaidé la nécessité de l’éolien, notamment face à « vent de colère » pour ne pas avoir à subir le doute sur ce sujet. Par ailleurs, la LPO a, dès 2014, pris position officiellement en faveur des énergies renouvelables (dans la ligne de Négawatt bien sûr avec la réduction de la consommation etc.). Je te joins cet avis complété en 2016.
Mais cet à priori favorable interdit-il d’avoir la même exigence de prise en compte de la biodiversité que nous l’avons pour n’importe quelle autre activité ?
Les ZPS ont été définies grâce aux données fournies par la LPO. Ce sont des secteurs à fort enjeu pour les oiseaux (ainsi que les ZSC pour les chauves-souris). Nous constatons scientifiquement qu’il y a plus de casse sur les secteurs Natura 2000. A l’heure où de nouveaux projets d’implantations sont prévus sur des zones Natura 2000, il me parait légitime de souhaiter d’autres sites. Par ailleurs, quel mal y a-t-il à faire une étude documentée et objective sur la situation actuelle ? Sommes-nous devenus comme les nucléocrates des années 70 incapables, même de discuter ?
Dans son bilan, la LPO souligne que … » le nombre de cas de collisions constaté apparait faible »… mais montre aussi « l’urgence de disposer d’un protocole de suivi robuste ».
Pour étayer le mauvais procès fait aux éoliennes, tu sors le vieil argument (qui m’insupporte !) de situations plus meurtrières. Ainsi donc, parce qu’il y a pire ailleurs, le sujet devient négligeable.
Quoi qu’il en soit, la LPO n’a pas attendu ton jugement pour lancer des campagnes de sensibilisation sur la mortalité due aux collisions sur les baies vitrées. Il suffit d’aller sur le site pour voir les conseils donnés dans le programme « oiseaux en détresse ».
De même, tu sembles mal informé concernant la prédation des oiseaux par les chats : c’est la LPO qui a initié un programme visant à limiter l’impact avec des tests réalisés chez des propriétaires. Cette démarche est soutenue et alimentée par une thèse en cours sur le sujet au Muséum National d’Histoire Naturelle.
En résumé, cher Roger, tu fais un bien triste procès à la LPO ….
Et il me serait agréable que tu fasses suivre la présente réponse aux destinataires de ton mail initial.
Bien à toi,
Allain Bougrain Dubourg
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En complément de cette lettre, Allain Bougrain Dubourg a souhaité nous apporter ces précisions supplémentaires.
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La synthèse de la LPO permet de confirmer qu’il y a entre 0,3 et 18,3 oiseaux tués par an et par éolienne. Soit une moyenne de 7. Ce qui correspond aux chiffres avancés dans d’autres pays.
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Avec 6000 éoliennes installées, ce sont environ 42.000 oiseaux qui seraient tués chaque année en France. Dont la majorité est protégée et certains bénéficient de PNA comme le Faucon Crécerellette victime d’un parc implanté en ZPS dans l’Hérault.
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Pour 8000 éoliennes projetées en 2023, et 12.000 à terme, on obtiendrait donc les chiffres respectifs de 56.000 et 84.000 oiseaux tués par an. Sans compter les chauves-souris.
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D’où l’intérêt de rectifier les erreurs du passé. Il ne s’agit évidemment pas de ne plus installer d’éoliennes, mais de les installer hors ZPS et ZSC. Selon le principe éviter, réduire, compenser imposé à tous. C’est ce que font déjà la plupart des pays européens pour l’éolien en mer. Avec un véritable enjeu concernant les premières installations qui arrivent à terme et demandent leur renouvèlement. Car à cette époque pourtant récente on ne ce souciait pas de biodiversité, le croirez-vous !? C’est la condition de la pérennisation de cette légitime industrie.
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