Pourquoi ce livre sur les arbres écrit par un forestier allemand a été numéro un des ventes en Allemagne avec 700 000 exemplaires ? Parce que son auteur sait de quoi il parle mais surtout parce qu’il a su employer un vocabulaire très accessible et un style agréable pour nous parler de sa passion pour les arbres et la forêt. Mais attention, rien d’ésotérique dans ce livre, Peter Wohlleben (son nom signifie bien vivre…) nous révèle les nombreuses manières dont les arbres se comportent en s’appuyant sur des travaux scientifiques et sur ses observations personnelles.
Ce forestier pas comme les autres est devenu sensible au bien être des arbres et à la santé de l’écosystème forestier. Non sans humour il avoue, quand il était forestier débutant : « j’en savais à peu près autant sur la vie secrète des arbres qu’un boucher sur la vie affective des animaux. » Mais très vite il va se rendre compte que la vision technique de la forêt ne prend absolument pas en compte le fonctionnement naturel de la forêt et des arbres. Ainsi il bat en brèche les méthodes sylvicoles préconisant des éclaircies fortes en signalant qu’une forêt de hêtres est plus productive si les arbres poussent serrés. La raison ? Les arbres serrés se répartissent mieux les substances nutritives et l’eau grâce aux connexions entre leurs racines dans l’intérêt du plus grand nombre par compensation mutuelle. Trop isolés et solitaires, les hêtres se retrouvent livrés à eux-mêmes et malheur aux faibles car les connexions racinaires « se perdent dans le vide. » Autre phénomène étrange : la manière dont les grands hêtres limitent la lumière à leur semis. Pourquoi ? Parce qu’une croissance lente permet d’atteindre un grand âge (ce qui n’intéresse plus les forestiers actuels) et favorisent des cellules petites contenant peu d’air, ce qui confère à l’arbre sa flexibilité face aux vents violents. Ils résistent également mieux aux champignons grâce à leurs tissus internes plus durs.
L’auteur revient également sur une idée fausse qui a la vie dure, à savoir que les jeunes arbres poussent plus vite que les vieux. Il s’appuie sur de récents travaux concernant 700 000 arbres sur tous les continents pour affirmer que plus les arbres sont vieux, plus ils poussent vite et l’auteur d’ajouter : « Depuis la publication de cette étude, prôner le rajeunissement des forêts pour les revitaliser s’apparente à de la tromperie. » Quant au bilan carbone des forêts, il remet en cause la vision simpliste du bilan équilibré des arbres en matière de gaz carbonique ainsi que la croyance selon laquelle la combustion du bois n’aurait aucun impact sur le climat. La plus grande part du carbone reste en forêt dans les sols. Le livre fourmille d’informations passionnantes sur les propriétés des arbres qu’il s’agisse de leur capacité à faire monter l’eau tout en haut des cimes, à désinfecter leur environnement grâce à des substances aux vertus antibiotiques ou répulsives, à réfléchir la lumière pour se protéger des coups de soleil grâce à un tronc de couleur blanche comme le bouleau ou à faire la photosynthèse sur les deux faces de ses feuilles comme le tremble (alors que pour les autres arbres une face est réservée à la respiration).
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Éditions Les Arènes , 272 pages, 20,90 € – www.arenes.fr
Contact presse : Isabelle Mazzaschi – i.mazza@arenes.fr
(Jean-Claude Génot)
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