L’écologie : rétrécie à Paris, élargie à Lyon..

par Laurent Samuel

20 novembre 2010

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Par un étrange jeu de vases communicants, le week-end des 13-14 novembre a été marqué par une expansion du principal parti écologiste français, désormais rebaptisé Europe Ecologie Les Verts (EELV), et par un rétrécissement du ministère de l’Ecologie.

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Dans le nouveau gouvernement de François Fillon, l’écologie perd le rang de ministère d’Etat, statut qui avait permis de satisfaire la promesse de nommer un vice Premier ministre de l’écologie, signée en 2007 par Nicolas Sarkozy comme par les autres candidats qui avaient souscrit au Pacte écologique de Nicolas Hulot. Le ministère rétrograde de la deuxième à la quatrième place dans l’ordre protocolaire, consacrant l’idée que la Défense et les Affaires étrangères sont des sujets plus sérieux et plus prioritaires que l’écologie.

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Plus grave, le ministère de l’Ecologie perd le secteur de l’énergie, placé désormais sous la houlette de Bercy, traditionnellement plus sensible aux lobbys des énergies fossiles et du nucléaire. Il garde en revanche la responsabilité de la lutte contre le changement climatique et de la mise en oeuvre des mesures du Grenelle de l’environnement en matière d’énergie.

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De plus, le ministère de l’Ecologie semble perdre sa compétence sur la Mer, qui ne figure plus dans son intitulé. S’il se confirme que ce secteur passe entre les mains du ministère de l’Agriculture, déjà responsable de la pêche, cela serait un très mauvais signe, d’autant plus que le ministre Bruno Le Maire s’est déclaré hostile à des quotas plus sévères sur les prises de thon rouge.

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(Note en date du 30 novembre 2010 : d’après le décret d’attribution précisant ses compétences, NKM garde les négociations climat et l’énergie, co-gère la sûreté nucléaire, et conserve la mer… sauf la pêche. On a donc échappé au pire.)

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S’il est prématuré de parler comme l’ont fait certains de « démantèlement » du ministère de l’Ecologie, son « périmètre » s’est donc pour le moins rétréci.

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Sur le plan politique, l’écologie a perdu un ministre dynamique, Jean-Louis Borloo, dont la nomination à Matignon aurait consacré (au moins sur le plan symbolique…) le souci du gouvernement pour l’écologie.

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Le ministère gagne une titulaire, Nathalie Kosciusko-Morizet (NKM) connaît parfaitement ses dossiers et a su se montrer combative, notamment sur les OGM, lorsqu’elle était secrétaire d’Etat du même Jean-Louis Borloo. Même si la conjoncture politique est peu favorable à l’environnement (thème quasiment absent de l’interview télévisée du Président Sarkozy le 16 novembre 2010), accordons à NKM le bénéfice du doute, avant de la juger sur ses actes.

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Paradoxe : pendant qu’à Paris, l’écologie se voyait ainsi rétrécie, elle se gonflait le même week-end à Lyon lors des «Assises constituantes », qui consacraient la fusion entre les Verts et Europe Ecologie. La nouvelle « entité », baptisée « Europe Ecologie les Verts » (EELV), a mis en place son dispositif pour la présidentielle de 2012, avec des « primaires » pour lesquelles Eva Joly et Yves Cochet sont les principaux candidats déclarés. Avec une inconnue en la personne de Nicolas Hulot, qui est venu à Lyon apporter son soutien au nouveau parti, mais a déclaré ne point exclure une candidature à la présidentielle…

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Certes, quelques mauvais esprits (dont l’auteur de ces lignes) ont noté le faible nombre de votants (un peu plus de 2000) pour décider du nom du parti, regretté l’absence de Corinne Lepage et de Gabriel Cohn-Bendit et se sont inquiétés d’une mainmise de l’appareil des Verts sur la nouvelle structure.

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Reste que, face au quasi-abandon de la thématique écologique par le gouvernement, et sous réserve de coups d’éclat inattendus de NKM ou d’une candidature écolo-centriste de Corine Lepage ou de Jean-Louis Borloo, un boulevard électoral devrait a priori s’ouvrir pour EELV. A condition toutefois que leur candidat(e) centre son discours sur l’écologie, ce qui, à mon très humble avis, n’est pas le cas (au moins pour l’instant) d’Eva Joly …

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Cet éditorial, comme tous ceux du site des JNE, n’engage que son auteur.