Géographie de l’instant

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Fils du journaliste Philippe Tesson, plus amateur de théâtre que d’écologie, Sylvain Tesson appartient à la confrérie des « écrivains voyageurs ». Il aime le silence, la lenteur, l’escalade, et il est capable de demeurer seul pendant six mois dans une isba près du lac Baïkal, au cœur de la Sibérie. De ces voyages et expériences multiples à travers le monde, de ses lectures aussi, dont il aime à citer quelque aphorisme, il tire à chaque occasion une leçon de vie. Après une fable de Pouchkine, il conclut : « Pas sûr qu’il faille se réjouir de vivre vieux ». Et après un escalade dans les Cévennes avec un vieux guide encore fringant, il constate : « Les hommes naissent peut-être égaux, mais ne vieillissent pas tels ».

Sylvain Tesson est devenu un écrivain « écolo », amoureux de la nature sauvage, que les Anglo-Saxons appellent wilderness.  Il rend hommage à Darwin, l’homme qui a écrit : « Nul individu à l’esprit impartial ne peut étudier une quelconque créature vivante, si humble soit-elle, sans être enthousiasmé par sa structure et ses caractéristiques admirables ». Lorsqu’il se trouve sur une plage du Yémen, il observe la naissance des tortues vertes qui rampent sur le sable jusqu’à la mer, en s’efforçant d’éviter la prédation des crabes, des renards et des oiseaux. Mais il sait qu’il ne faut pas intervenir afin de laisser les survivantes prendre leurs repères pour revenir pondre à l’âge adulte. Il collectionne les fossiles, témoins de l’histoire naturelle de la Terre.

Il  se déclare partisan de la décroissance, telle que la prône le naturaliste Aldo Leopold. « La croissance : triste tropisme », écrit-il en parodiant le titre de Claude Lévi-Strauss. Il refuse le téléphone portable, même lorsqu’il se trouve chez les Nenets ou les Bouriates, à mille lieux de chez lui. Il proclame : « Sans amour, sans foi et sans révolte, il n’y a pas d’écologie ». Révolté, lui ? Non. « Le militantisme m’indiffère au plus haut point, avoue-t-il. Le combat idéologique m’intéresse encore moins que le marketing ! ». Considérant les soubresauts du « printemps arabe », il conclut : « La révolution ? Un changement de propriétaires ». Roger Cans.


Editions des Equateurs, 346 pages, 19 € – www.equateurs.fr
Contact presse : Caroline Bokanowski. Tél. : 06 85 65 79 75 – carolinequateurs@orange.fr
(Roger Cans)