« L’Âge de Faire » fête ses vingt ans

Quelque part entre 2024 et 2025, le journal L’Âge de Faire fête ses vingt ans. 

par Jocelyn Peyret

Fabien, chargé de la diffusion de ce titre, nous raconte : « en 2004, Alain Duez (1), le fondateur (membre des JNE), fait le tour de France des foires biologiques pour pré-vendre son journal qui sortira fin 2005. Au début le rythme était un peu aléatoire, mais finalement ça s’est calé en périodicité mensuelle. »

Le but du journal est de faire connaître auprès du grand public les alternatives concrètes en matière d’écologie, d’environnement, de citoyenneté, de solidarité. « L’idée est venue du Réseau Sortir du nucléaire qui, en 2001, a imprimé à fort tirage un format tabloïd diffusé à faible prix. » (2) Alain Duez a alors décidé « de tirer un journal à un grand nombre d’exemplaires pour qu’il soit accessible au plus grand nombre. C’est ce qui a été fait par souscription militante. L’argent a été récolté avant la première impression, de manière à pouvoir attaquer une diffusion très large. Je crois qu’il y avait 40 000 exemplaires à imprimer tous les mois au lancement du journal. »

L’objet de L’Âge de Faire, c’est de « relayer les alternatives qui peuvent être traités dans tous les domaines. C’est faire un petit pas de côté et regarder ça d’un œil différent ».

 

Pour Lisa, journaliste, « c’est un journal mensuel et l’idée est de montrer ce que font des gens, beaucoup collectivement mais aussi individuellement, qui va dans le sens de plus de solidarité, d’une réappropriation un peu de tous les domaines de la vie. Donc on parle beaucoup d’économie coopérative, d’écologie, des actions de solidarité, des luttes militantes. Voilà, tout ce qui contribue à inventer un monde qui nous semble meilleur. »

 

Jusqu’en 2011, une association portait le projet, avant que ne soit créée une société coopérative de production (SCOP). Ce fonctionnement permet que le journal appartienne aux salarié.e.s plus quelques autres personnes, des anciens salarié.e.s pour la plupart.

Depuis 2020, les bureaux du journal sont à Château Arnaud Saint-Auban (04), dans une cité ouvrière dans « un bâtiment racheté à l’usine. L’idée c’était d’abord de partager un endroit. Avec « l’Âge de Faire », on avait très envie de ne plus être tout seul dans nos locaux. Et en fait, dans nos pages, on n’arrête pas de parler d’expérience citoyenne, de création de projets collectifs, d’autogestion, de comment on peut s’inscrire dans son territoire, etc. Et on avait très envie de le mettre en œuvre concrètement ».

Ainsi est née la Maison Commune, « une structure que nous avons créée, nous explique Fabien, une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC), ce qui fait qu’on partage le bâtiment avec une MJC et Graines de culture une association d’éducation à l’environnement ».

L’Âge de Faire, c’est aussi la parution de livres, depuis peu en partenariat avec la maison d’édition Le Passager Clandestin (3) car « le livre et la presse, ce n’est pas le même métier », précise Fabien. La dernière collaboration est le livre du journaliste Fabien Ginisty, Bla Bla Car et son monde (4), qui révèle la face cachée du covoiturage aux mains d’une firme qui « a construit un quasi-monopole sur ce mode de transport ».

Autre publication majeure, le journal propose une carte de France, en papier, de la Presse pas pareille (5). Elle concerne des médias qui « n’appartiennent pas à un groupe financier, mais, en majorité, à leurs lecteurs ou à leurs salariés et qui contiennent moins de 10 % de pub sur la pagination ».

En ce qui concerne sa diffusion, le journal, qui n’est pas présent dans les kiosques, a développé un système un peu particulier. « Nous avons des diffuseurs qui peuvent être des magasins, des associations ou des personnes qui diffusent dans leur entourage. Ils nous commandent des journaux et ensuite ils les revendent avec une marge. L’avantage de notre système, c’est que l’on imprime que ce que l’on vend, contrairement au système classique où il faut imprimer beaucoup et ensuite détruire beaucoup. Ça contribue à un gaspillage énergétique et de matière ».

Dans la suite de cette idée, le journal a décidé en novembre dernier de « renverser la vapeur » et a déclaré : « notre avenir ne passera pas par une croissance de notre activité numérique. L’idée est donc d’en faire moins pour le web, et de nous recentrer sur ce que nous savons faire le mieux : un journal papier. De nombreuses raisons expliquent ce choix. Nous nous sommes aperçus, à l’usage, que l’actualisation et la gestion d’un tel site étaient aussi chronophages que laborieuses pour une petite structure comme la nôtre. Notre volonté de désinvestir le web répond surtout à certaines de nos convictions : pour de multiples raisons (pollution, surveillance, exploitation humaine, appauvrissement des relations sociales, etc.) nous ne souhaitons pas encourager la numérisation du monde. Non, on ne trouvera donc pas « tout » sur le web ».

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7 décembre 2024

Pour aller plus loin
– L’Âge de Faire – https://lagedefaire-lejournal.fr/
– Les Autres Voix de la Presse est une émission hebdomadaire qui donne la parole à un média indépendant – www.lesautresvoixdelapresse.fr

(1) Alain Duez est aujourd’hui partie prenante du site d’information Demain en mains.
(2) Il s’agit du numéro unique titré L’Aberration dont la première version, fin 2001, fut retirée suite à une plainte de Libération pour plagiat de la une. La seconde version propose une autre mise en page.
(3) https://www.lepassagerclandestin.fr/
(4) Blablacar et son monde. Enquête sur la face cachée du covoiturage, Fabien Ginisty, Ed. Le Passager Clandestin & L’Âge de Faire, 2024.
(5) https://lagedefaire-lejournal.fr/la-carte-de-la-presse-pas-pareille-2024/