Parler « trans » et sans débat aux Journées d’été des Ecologistes – par Michel Sourrouille

Les Journées d’été des Écologistes (ex-EELV) ont eu lieu du 22 au 24 août à Tours. J’ai suivi avec intérêt la profusion des idées « en tous genres », et c’est le cas de le dire. Le thème de l’atelier auquel j’ai assisté le jeudi : « Transphobie et propagande d’extrême droite : la conquête des droits comme contre-offensive ». Question de genre donc !

Ce sont principalement les commissions thématiques qui préparent ces rencontres. Elles sont nombreuses chez les écologistes, 40 au dernier recensement : antiracisme, biodiversité, post-croissance,… et pour ce qui concerne cet atelier, la commission LGBTQIA+. Pour les non connaisseurs, lesbiennes, gays, bisexuel ·le·s , trans, queer, intersexué·e·s, asexuel·le·s, le + permettant d’inclure toutes les autres possibilités de genre … L’imagination humaine n’a pas de limites. Il faut un bon dictionnaire pour s’y retrouver dans les affres de l’identité psy de nos contemporains. L’assistance sous un tipi et sur des sièges en carton comptait environ 60 personnes d’apparence normale, pas de drag queen. Notons en passant que les hétérosexuels, cisgenres et autres dyadiques n’ont pas encore leur groupe de travail chez les Verts.

L’écolo Mélanie Vogel est à la tribune, on précise bien « en tant que lesbienne », bien qu’elle soit aussi sénatrice. Élie Bouet est à la tribune. Normal, il est référent LGBTQIA+ au bureau confédéral du Planning familial. Rappelons que lors de son congrès début novembre 2022, ce mouvement a acté une ligne « intersectionnelle » au détriment d’une orientation universaliste. Puisqu’il faut traduire chaque mot, « intersectionnalité » est un concept récent utilisé dans les études de genre qui souligne la multiplicité des discriminations.

Le message répété par tous les conférenciers sans exception est clair : il faut lutter contre la transphobie, ce serait le cheval de Troie d’ une extrême droite anti-homo, patriarcale, et ouverte à toutes les discriminations. Donc condamnation de l’extrême droite et valorisation des LGBT, même combat, c’ est dans l’ADN des écolos. L ’évolution sociétale fait évoluer la loi, vivement qu’il y ait des parlementaires trans. Les droits humains comporteraient nécessairement le droit de changer de sexe à tout âge. Etc. Le public est acquis, on ne se pose pas de questions, on n’en pose pas, aucune voix dissonante ne se fait entendre. Le problème politique qui a été évoqué lors de cet atelier, c’est le projet de loi de l a sénatrice Jacqueline Eustache-Brinio (LR) qui vise à encadrer les pratiques médicales dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre. Transmis à l’Assemblée nationale le 23 juillet 2024 : « Dans le cadre de la prise en charge de la dysphorie de genre, il est interdit de prescrire au patient mineur des traitements hormonaux tendant à développer les caractéristiques sexuelles secondaires du genre auquel le mineur s’identifie. Il est également interdit de réaliser sur un patient mineur des actes chirurgicaux de réassignation de genre. » Précisons, puisque en matière de genre humain l’affaire est très compliquée, que le terme « dysphorie de genre » décrit le sentiment de détresse ou de souffrance qui peut être exprimé parfois par les personnes dont l’identité sexuée ne correspond pas au sexe qui leur a été assigné à la naissance. On aurait dû échanger longuement sur le cas des mineurs alors qu’il y a irréversibilité des « transitions de genre ». Je note pourtant que cet aspect juridique important n’a lui aussi soulevé aucun débat ce 22 août.

Enfin, on ne voit pas pourquoi le déni de réalité devrait être idéalisé lorsqu’il s’agit de biologie, mais combattu lorsqu’il s’agit de « vérités alternatives » à la Trump. D’autant plus que cette focalisation sur une « question de société » s’opère au détriment de toute considération des rapports de plus en plus difficiles entre les humains et la nature. L’écologie, c’est le sens des limites, un sentiment qui se perd dans une société où tout semble techniquement possible. Avec le combat LGBT,  c’est le ressenti des personnes qui compte, et là il y a encore moins de limites.

Pour un parti écologiste, y a-t-il en définitive un intérêt politique de soutenir la cause trans ? Parler LGBTQIA+ permet-il l’expansion de l’écologie, ou fait-il au contraire le lit de l’extrême droite quand on devient par son extrémisme sociétal une cible d’attaque ? Certes, la discrimination est alimentée par l’extrême droite. Mais le fait d’être transsexuel empêche-t-il de voter Rassemblement national ? Devenir LGBT fait-il de vous un écolo ? Ne simplifions pas la réflexion socio-politique.

Photo : Michel Sourrouille