«Mag de la santé», «Vert de rage»… Neuf associations de journalistes spécialisés (dont les JNE) alertent sur la suppression de programmes scientifiques sur le service public : un très mauvais signal envoyé dans la lutte contre la désinformation.
Nous, membres de neuf associations de journalistes spécialisés, sommes très inquiets quant à la place accordée aux sciences – dont la médecine – sur les antennes de France Télévisions.
Plusieurs décisions nous interpellent, à commencer par l’arrêt de la série-documentaire Vert de rage. Lancées en 2018, ces enquêtes au long cours, menées par Martin Boudot, ont permis de dévoiler des scandales environnementaux et de montrer au public les méthodes scientifiques nécessaires à leur démonstration. Cette décision de suppression est une hérésie à l’heure de l’urgence climatique et des crises environnementales. D’autant que ces enquêtes ont toutes été largement relayées par la presse grand public, démontrant leur efficacité pour l’information des populations.
L’autre suppression annoncée est celle du Mag de la santé sur France 5, émission médicale de référence depuis plus de vingt-cinq ans. Au moment où toutes les études alertent sur la montée en puissance des fake news dans ce domaine – notamment sur les réseaux sociaux, canaux majoritairement consultés par des utilisateurs de plus en plus méfiants envers les médias traditionnels – nous attirons votre attention sur les conséquences d’une telle décision.
Une politique d’effacement des sciences
Mettre fin à une émission quotidienne de qualité nous semble en effet un très mauvais signal envoyé dans la lutte contre la désinformation, qui est pourtant l’un des engagements de la télévision publique. Le travail de journalistes spécialisés capables de sélectionner des informations vérifiées ainsi que l’intervention d’experts reconnus est essentiel. Nous rappelons en outre que la santé n’est pas une thématique comme les autres. Derrière l’écran, des vies de patients sont en jeu.
Ces cas, hélas, ne sont pas isolés. D’autres suppressions récentes d’émissions nous inquiètent également : les Pouvoirs extraordinaires du corps humain (France 2) depuis cette rentrée et C Jamy (France 5), émission d’une grande qualité et exigence qui n’aura duré qu’un an et demi. C’est une politique d’effacement des sciences que France Télévisions semble mettre en œuvre dans ses programmes.
Nous regrettons également la place étroite réservée aux documentaires scientifiques. La case «Science grand format», seul rendez-vous dédié, ne permet pas à elle seule de couvrir toute la variété des champs disciplinaires.
Engagements de service public
Enfin, nous ne pouvons que remarquer et alerter sur l’absence totale des sciences dans les programmes magazines du réseau régional France 3.
Dans une société de plus en plus technologique, au croisement de plusieurs crises environnementales globales, le climat, la pollution, la biodiversité, l’énergie, autant de phénomènes qui impactent la santé de personne, négliger l’information et la culture scientifique contrevient aux missions d’informer, d’éduquer et d’animer le débat démocratique de la télévision publique.
Nous demandons donc à ce que France Télévisions, conformément à ses engagements de service public, reconsidère la place des sciences dans sa programmation de la saison 2024/2025.
Signataires : Association des journalistes scientifiques de la presse d’information (AJSPI), Association des journalistes-écrivains pour la nature et l’écologie (JNE), Association des journalistes de l’information sociale (AJIS), Association de la presse étrangère en France (APE), Association des journalistes de l’énergie (AJDE), Association française des journalistes agricoles, de l’alimentation, de l’environnement et de la ruralité (AFJA), Association des journalistes médicaux de la presse grand public (Ajmed), Profession : Pigiste (PP), Association des journalistes professionnels de l’aéronautique et de l’espace (AJPAE).