Nées du Grenelle de l’Environnement, en 2007, les trames vertes et bleues (TVB) désignent des corridors biologiques permettant de relier entre eux des réservoirs de biodiversité (zones où la biodiversité est la plus riche) d’une région. Les trames vertes correspondent aux terres et les bleues aux cours d’eau, parfois interrompues par des barrages ou autres constructions humaines.
par Christine Virbel
L’objectif de ces trames est de faciliter les contacts à la faune sauvage pour sa reproduction et d’éviter la consanguinité qui résulte parfois d’un confinement de quelques individus sur un seul lieu. Les trames permettent aussi d’éviter la disparition complète d’espèces, faute de partenaire de reproduction sur le lieu de vie d’un unique individu. C’est dire qu’elles sont d’une grande importance car l’urbanisation, les routes et autoroutes ou les voies de chemins de fer ainsi que les grandes étendues d’agriculture intensive sont les principales causes de la disparition des habitats de la faune sauvage et de leur fragmentation, entraînant une perte dramatique* de la biodiversité en France et dans le monde entier.
Au fur et à mesure des découvertes scientifiques, de nouvelles couleurs de trames ont vu le jour : la trame brune, visant à sauvegarder les sols et les milliers d’espèces vivantes qui en assurent la fertilité ; la trame noire, pour protéger les espèces nocturnes tout aussi importantes que les espèces diurnes ; la trame turquoise qui se concentre plus particulièrement sur les milieux humides et les bords de cours d’eau (les ripisylves) et concerne, par exemple, les libellules, certains papillons ou oiseaux, les amphibiens (salamandres, serpents et grenouilles) pour leur assurer un déroulement complet de leur cycle de vie entre terre et eau.
Selon la loi, ces trames doivent être prises en compte en amont de tout projet d’aménagement du territoire et dans les PLU (plans locaux d’urbanisme) des communes, ou PLUi pour les communautés de communes. Pourtant, encore trop de maires n’en ont jamais entendu parler ! Parmi ceux qui les connaissent, un certain découragement s’observe lorsqu’on leur annonce… la couleur de trames nouvellement créées.
Pour sensibiliser les communes les plus petites ou les maires submergés par tant de teintes de trames, les associations environnementales locales sont d’une grande utilité. France Nature Environnement du Val de Loire a récemment organisé une journée entière à ce sujet dans la ville d’Orléans. Parmi la cinquantaine de personnes participant au séminaire, un seul maire présent, mais qui est reparti convaincu de la nécessité d’instaurer ces trames et de sensibiliser les maires des communes avoisinantes.
Afin d’aider les villes et les communes, l’État a élaboré des outils pratiques pour créer un PLU ou un PLUi. Il est également fortement conseillé de faire appel à des organismes spécialisés dans cette démarche, qui prendront en charge l’étude préalable, le déroulement du projet, mais aussi la communication auprès de la population pour une appropriation des mesures à mettre en place. En effet, il est important d’expliquer aux habitants que la faune réagit aux sources lumineuses, mais aussi sonores ou olfactives et que renaturer un espace sera bénéfique aux humains (santé et tranquillité) comme à la biodiversité. Ces organismes pourront également rassurer les édiles en leur expliquant que mettre en place une trame verte et bleue prend déjà en partie les autres couleurs de trames, notamment la brune et la turquoise ou qu’elle cumule des avantages, comme souvent la diminution des pollutions sonore et olfactive en une seule fois sur un même endroit. Il ne reste donc plus qu’à éteindre les lumières ou à en diminuer l’intensité et les plages horaires pour mettre en place la trame noire.
Les TVB ne sont pas si compliquées à mettre en place. Un argument de poids peut encore convaincre les maires de les intégrer à leurs projets d’aménagement : un PLU peut être attaqué s’il ne respecte pas la loi !
* La perte actuelle de biodiversité est de 10 à 100 fois supérieure aux extinctions d’espèces naturelles connues sur Terre selon les scientifiques et en fonction des espèces étudiées.
Photo : une chèvre désherbe naturellement les bords de la Loire à Orléans © CVA