Depuis sa création, Nothing2Hide (N2H) a formé plusieurs milliers de journalistes, militants, et citoyens dans une vingtaine de pays, afin de les aider à se protéger du piratage et de la censure.
par MH Léon
L’ADN de N2H, c’est la protection numérique, comme l’explique son cofondateur Grégoire Pouget : « La plupart des structures impliquées dans le soutien média ou la protection de la liberté d’expression (RSF, CPJ, Freedom Voices) externalisent les compétences techniques et sont rarement en capacité d’apporter un soutien technique sur le long terme. Nothing2Hide est une structure légère et agile, dont l’ADN est la technologie pour tous. Notre expérience nous permet d’être au plus près des besoins du terrain et des évolutions techniques. »
Or, on le sait, rares sont les journalistes, militants ou citoyens à conjuguer leur talent avec celui de technicien informatique. C’est ici qu’intervient N2H. « Notre expérience d’animation de formations au sein d’écoles (ESJ Lille, ESJ Pro, école de journalisme de Tours, école de journalisme de Grenoble, IUT de journalisme de Lannion) et auprès de professionnels de l’information (Cash Investigation, Radio France, France Télévision) nous a appris à échanger sur des sujets techniques avec un public de non-techniciens. »
Des interventions tout-terrain
L’association intervient régulièrement auprès de journalistes partis sur le terrain et confrontés à des problèmes de censure ou de surveillance. « Nos missions sur le terrain nous ont également appris à mettre en œuvre des solutions efficaces avec des moyens simples, y compris dans des contextes de forte surveillance, comme en Turquie ou en Syrie. » Au cours des différentes missions, l’association a développé un réseau d’experts sur le terrain qui peuvent venir en aide à des journalistes confrontés à des situations de surveillance. Ainsi Nothing2Hide est membre du réseau de journalisme d’investigation (Global Investigative Journalism Network – GIJN), membre fondateur de la Maison des lanceurs d’alerte et membre du réseau Civicert. Pour favoriser la réutilisation et la diffusion de l’information, tous les outils publiés, supports pédagogiques ou logiciels, sont diffusés sous licence libre (CC BY SA), afin que chacun puisse s’en emparer.
L’interview express
– Grégoire, pourquoi avoir créé Nothing2Hide ?
– Nous avons créé N2H avec d’anciens collègues de Reporters Sans Frontières, car nous avons constaté le besoin d’avoir une structure technique, un ADN technique. Cela correspondait à une attente.
– Les journalistes et écrivains spécialisés dans l’environnement sont particulièrement ciblés dans le monde et désormais en France également. Qu’est-ce que l’association peut faire pour eux ?
– Nothing2Hide peut les aider sur de nombreux plans. Par exemple, nous avons formé des activistes du climat. Nous avons d’ailleurs un programme destiné à former gratuitement ceux et celles qui travaillent sur le climat. On a aussi réalisé des actions de formation pour des personnes qui travaillent sur le secteur minier. Nos formations sont également opérationnelles pour les journalistes qui travaillent sur le nucléaire et d’autres sujets sensibles. On les aide à protéger les données, leurs sources, leurs informations. On est à leur disposition !
– Que répondre aux soupçonneux craignant que l’association soit un « pot de miel » ?
– C’est très bien d’être soupçonneux car la protection numérique est aussi affaire de prise de conscience des risques. Mais, en matière de sécurité numérique, à un moment donné, il faut accorder sa confiance à un tiers. Nous ne travaillons qu’avec des gens qu’on a rencontrés. Tout ce qu’on fait, nos projets, méthodologies, logiciels, outils, sont publics. De même nos supports pédagogiques. Tout est fait à la manière du logiciel libre.
– Aujourd’hui, tout concourt à travailler via des ordinateurs et des smartphones. Les solutions préconisées par N2H peuvent-elle garantir la totale confidentialité et sécurité des échanges numériques ?
– «On dit que rien n’est inviolable ! Il faut évaluer ses risques, ses moyens et l’énergie à investir. Souvent, on a besoin de sécuriser les informations juste le temps de préparer et mener un reportage. Il faut chiffrer son disque dur, mais ce n’est pas suffisant. La sécurité numérique, c’est un processus et rien n’est jamais sûr à 100 % ! Ce qu’il faut, c’est rendre le piratage long et difficile. Prenons l’exemple du smartphon,. Il faut adopter une hygiène numérique. Ne pas installer des logiciels inutiles. Car si votre téléphone est vérolé, même en faisant un hard reset, certains virus restent… Globalement, il faut partir sur une base saine, identifier les informations sensibles, compartimenter. On parle de modèle de menace. C’est à chacun de l’établir à partir de questions simples mais essentielles. Et garder en tête que dans le domaine de la sécurité numérique, c’est tout un réseau qui doit être attentif. Il faut que tout le monde ait un niveau de sécurité élevé. Notre association est là pour aider et former.
– Alors, comment peut-on participer au développement de l’association ? Comment adhérer ?
– En faisant un don à l’association. Une campagne vient d’être lancée. Elle permettra de financer des opérations, des formations gratuites, la hotline… On organise des formations gratuites pour les membres de l’association. Il faut s’inscrire à la newsletter pour être informé.
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Photo du haut : Nothing2Hide lance une campagne de dons pour aider journalistes et militants à protéger leurs informations et leurs communications ©N2H