C’est le récit romancé d’un événement concernant la mort d’un éleveur Jérôme Laronze, abattu par les gendarmes. Il avait une première fois été question de ce fait divers sur ARTE, avec un très intéressant documentaire intitulé : Sacrifice paysan.
Le livre fait vivre la cavale de 9 jours jusqu’à la fin tragique de la victime après un xième contrôle sanitaire. Jérôme Laronze dénommé pour la fiction Jacques Bonhomme et plusieurs personnages de son entourage s’expriment tour à tour pour expliquer l’enchaînement mortifère des événements. Nous y découvrons plusieurs étapes fondatrices de l’engrenage fatal qui va progressivement s’enclencher. Mais au-delà de ce terrible drame, il est possible de comprend que, préconiser la polyculture élevage, c’est à la fois concret avec des pratiques agricoles éprouvées, mais aussi en décalage profond avec l’actuelle réalité administrative, politique et humaine. Tous ceux qui se sont engagés dans la recherche de solutions pour le climat, la biodiversité et la vie sur la planète, sont arrivé à la conviction qu’il va falloir opérer une véritable métamorphose de l’agriculture et de l’alimentation. Qu’il faut rapidement rompre avec la monoculture et l’élevage intensifs au profit de l’agroécologie c’est-à-dire la polyculture élevage, sans labours, sous couvert végétal. D’arrêter le cycle infernal de fermes industrielles toujours plus grandes pour multiplier les fermes paysannes à dimension humaine.
Les écrits de Marc Dufumier : « L’agroécologie peut nous sauver », ou encore Jacques Caplat, Vandana Shiva et André Leu : « Une agriculture qui répare la planète » à eux seuls ont démontré, non seulement quelle direction prendre, mais aussi que pratiquement tous les savoir-faire nécessaires sont connus et ne demandent qu’à être mis en œuvre. Fini les fermes usines bétonnées dans lesquelles des animaux surexploités grâce à des technologies de pointe, ne voient jamais un brin d’herbe et sont nourris avec des tourteaux de soja OGM issus de la déforestation de l’Amazonie. Également fini les monocultures intensives irriguées et arrosées d’intrants issus de la pétrochimie, dégageant du protoxyde d’azote, des algues vertes inondées d’insecticides destructeurs de la biodiversité.
Vive les haies entourant les pâturages et les terres amendées avec des intrants organiques, du fumier provenant d’élevages à taille humaine. Seulement pour que ce rêve arrive il ne faudra pas seulement convaincre des agriculteurs et des éleveurs que là réside leur avenir. Fini la recherche ininterrompue de productivité, le toujours plus, vive la qualité, le toujours mieux. Nombreux sont ceux qui à l’instar de Jérôme Larouze aspirent à cette nouvelle agriculture, mais nos institutions sont-elles adaptées à ce changement radical de perspective ? C’est paradoxalement au nom de la traçabilité pour le consommateur et du bien-être animal que le pire est arrivé. Jacques Bonhomme, au lieu d’être aidé, soutenu dans ses choix vertueux, se retrouve très vite pris dans un imbroglio bureaucratique qui précipite sa chute jusqu’à la touche finale : des balles tirées par un gendarme probablement apeuré par le costume de dangereux délinquant que les institutions avaient taillé pour cet éleveur qui ne voulait que faire au mieux son métier de paysan.
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Éditions Actes Sud, 336 pages, 22 € – www.actes-sud.fr
Contact presse : Émanuèle Gaulier. Tél.: 01 55 42 63 24 – e.gaulier@actes-sud.fr
(Jean-Luc Fessard)
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