Contre La Hague, Tchernobyl, Fukushima, même combat : l’éco-féminisme en plein renouveau. Cette Hague republiée (1) reste tout aussi bouleversante. Xavière Gauthier (pionnière de l’éco-féminisme) nous rappelle son attachement maternel à cette terre du Cotentin qui l’a vue naître et qui est devenue une poubelle nucléaire. Elle se sent « mère » de ce terroir à la façon d’une Amérindienne de la pacha-mama (déesse-Terre) . L’identification puissante de cette femme, si énergique, à la nature marque le renouveau d’un féminisme actuel : un jalon et marque de l’éco-féminisme contemporain. Son cri d’alarme multiplié résonne aujourd’hui autrement, car elle partage désespoir et colère avec deux autres femmes, Sophie Houdart et Isabelle Cambourakis. De mail en mail, de rencontre en rencontre, les femmes s’apprivoisent avec la même détermination. Elles « tressent » en amies engagées une natte de colère et de révolte.
Mais aussi, leur colère de femmes contre l’inconscience des hommes nourrit notre angoisse et nous renvoie à ces deux femmes malades de Tchernobyl et Maïak (complexe nucléaire soviétique de l’Oural du sud dans lequel un très grave accident a eu lieu en 1957) qui ont raconté en 2016 devant les JNE (2) comment l’URSS a masqué les catastrophes en effaçant le nom des villes pour effacer le désespoir de ses habitants après les catastrophes nucléaires de Tchernobyl et Maïak (cette dernière reste mal connue). Sur ces sites, de nombreux habitants sont décédés des suites d’une exposition aux rayonnements ionisants. En 2006, selon des habitants d’Ozersk (ville sur le territoire de laquelle se trouve le complexe de Maiak), il n’y a plus de risque d’irradiation, car les émetteurs de rayonnements ionisants ont subi leur décroissance radioactive. C’est probablement faux. L’administration de Maïak a été critiquée à plusieurs reprises pour des pratiques environnementales douteuses et meurtrières. Par ailleurs, les contrôles radiologiques effectués en 2008 par le laboratoire de la CRIRAD – Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité – démontrent la persistance de la contamination dans des villages situés à 35 et 78 km du site nucléaire de Maïak. Cessons de libérer des polluants contaminés dans la nature et dans l’eau potable. Respectons les êtres humains.
Le livre de ce trio de femmes doit ouvrir aujourd’hui sur un mouvement antinucléaire féminin au nom du respect de la vie humaine. Les enfants et petits-enfants sont l’enjeu de nos engagements pour l’avenir (si nous voulons en avoir un). Rejoignons cette colère des femmes. Il est désormais question de la catastrophe nucléaire ultime. Le tressage de l’autrice s’étend à Greta Thunberg qui fait passer le trio en quatuor. En attendant de nouvelles sorcières anti-nucléaires…
(1) Une première version de ce livre était parue en 1981 sous le titre La Hague, ma terre violentée, aux éditions Mercure de France.
(2) Cliquez sur ce lien pour lire le compte-rendu de la conférence de presse organisée en 2016 par les JNE
Éditions Cambourakis, collection Sorcières, 232 pages, 20 € – www.cambourakis.com
Contact presse : Melissa Blanchard. Tél.: 01 80 05 94 17 – melissa@cambourakis.com
(Jane Hervé)