Un projet à l’encontre du bon sens environnemental pourrait voir le jour dans la région du Tricastin, dans la Drôme. Un échangeur sur l’autoroute A7 serait en gestation pour un coût de 21 millions d’euros. Le projet se situe à quelques kilomètres seulement des échangeurs déjà existants de Bollène et Montélimar sud , et entraînerait l’expropriation de plusieurs hectares de terres agricoles cultivées.
par Séverine
Denis Hugues exploite la ferme familiale depuis des décennies. L’agriculteur de Saint-Paul-Trois-Châteaux est aujourd’hui désemparé : « Au départ, Vinci m’a dit que nous serions expropriés de 8 hectares, puis c’est monté à 10 ha, puis 12 ha… On entend parler aussi d’installer un parking de covoiturage, et de créer des bassins de rétention. Combien de terres agricoles allons-nous devoir abandonner ? » C’est un sentiment de tristesse pour toute une famille d’agriculteurs installée dans le secteur depuis des générations. Et une incompréhension également. Comment leur commune peut-elle laisser faire une telle gabegie écologique et financière pour un gain de parcours de quelques minutes ?
Face à cette aberration, un collectif s’est levé afin de lutter contre ce projet et soutenir l’agriculteur. Pour Marie, « cet échangeur est totalement contre-productif. Vingt-et-un millions d’euros ! C’est une somme qu’il serait plus pertinent de mobiliser à des services utiles comme des mobilités douces et collectives de la population locale ; des transports collectifs, des voies cyclables… ».
Même diagnostic pour Sophie, également membre du collectif : « On a pris connaissance avec stupéfaction de l’arrêté du préfet de la Drôme du 27 octobre dernier, fixant des objectifs et des modalités d’une concertation avec le public sur ce projet d’échangeur. Cette concertation, du 17 novembre 2020 jusqu’au 11 décembre 2020, prévoyait une consultation du projet dans les mairies des communes concernées, des réunions publiques en présence des représentants de Vinci et une consultation par Internet du dossier. Quelqu’un avait-il oublié que nous étions confinés depuis le 30 octobre ? »
Concertation confinée
On peut effectivement s’interroger sur la période particulière pendant laquelle s’est effectuée la consultation. « De plus, il était prévu comme mode d’expression des avis que cela puisse se faire sur registre dans les mairies dont nous savons que les plages horaires d’ouverture au public sont restreintes, par courriel, au moyen d’un formulaire sur le site de Vinci Autoroutes (organisateur de cette consultation), mais tous les habitants sont-ils équipés en informatique et/ou techniquement aptes à la pratique d’Internet ? Personne ne semble se poser la question… »
Comment échanger quand on est confiné ? « Mais surtout, ce sont bien les réunions publiques qui restent les vrais lieux d’échanges interactifs or les circonstances sanitaires ne le permettent pas. Nous avons donc le sentiment d’une certaine forme de confiscation de la liberté d’expression et surtout de la parole publique. C’est ce point particulier, la forme de cette consultation, qui nous a poussé en premier lieu à constituer un collectif. Ensuite, c’est le projet lui-même qui nous a interpellés. Nous avons déposé un recours contre l’arrêté préfectoral. »
Si le bilan de la concertation annonce quelque 5600 participants, dont une majorité favorable au projet, le parcours est loin d’être terminé. Le préfet de la Drôme pourrait décider de la déclaration d’utilité publique d’ici 2023, et les travaux n’interviendraient pas avant 2024 pour une mise en service prévisionnelle en 2026. Les Tricastins, comme tant d’autres, étant de plus en plus nombreux à se lever contre la bétonisation du vivant, la famille Hugues garde l’espoir de continuer à voir fleurir ses champs.
Pour en savoir plus
collectif.citoyens.antigaspisp3c@gmail.com
www.facebook.com/groups/contrelechangeurautoroutierdromeprovencale
www.mesopinions.com/petition/nature-environnement/echangeur-autoroutier-a7-drome-provencale/116887