par Thomas Blosseville |
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A peine présenté et déjà très critiqué. Le projet de loi issu des travaux de la Convention citoyenne pour le climat entame son parcours législatif. Il sera débattu à l’Assemblée nationale à partir de mars. Ce texte était attendu depuis des mois, après la consultation de 150 citoyens tirés au sort pour constituer cette fameuse Convention citoyenne. Ce processus a fait couler beaucoup d’encre. Au final, comme beaucoup le redoutaient, le projet de loi du gouvernement a considérablement amoindri les propositions des citoyens. Pour autant, cette expérience a eu trois mérites.
D’abord, permettre à des citoyens novices de s’emparer de l’enjeu climatique et de prendre conscience de l’ampleur des changements qu’il induisait. Ensuite, contribuer à inscrire le climat dans l’agenda médiatique. Enfin, soulever des interrogations sur notre fonctionnement démocratique et le rôle des citoyens dans l’élaboration des lois.
On peut considérer ces trois mérites comme autant de bonnes nouvelles. Après tout, la vocation de notre association JNE est d’œuvrer à la diffusion des informations et des connaissances sur les problématiques écologiques. La Convention a montré combien l’information pouvait être une puissante force de conviction des citoyens. Elle leur a fourni la matière première pour élaborer d’ambitieuses propositions. A l’inverse, on peut accueillir le projet de loi du gouvernement avec une grande circonspection, même s’il sera amendé lors de son examen au Parlement. La force de conviction des citoyens s’est arrêtée aux portes des ministères. Elle s’y est heurtée à des peurs, conservatismes, luttes d’influence…
Un constat s’impose tout de même. Le changement climatique est présent depuis longtemps dans le débat public. Ce projet de loi n’est pas le premier du quinquennat à aborder la question. Avant lui, il y a eu une loi sur le logement promulguée fin 2018. Il y a eu aussi une loi « énergie-climat » et une loi « mobilité », toutes deux adoptées fin 2019. Ces trois lois concernaient déjà la lutte contre le changement climatique. Sans oublier la loi de finances qui, chaque année, traite de fiscalité sur l’énergie et sur les émissions de gaz à effet de serre. Ou encore, les divers décrets et arrêtés en cours d’élaboration, par exemple la nouvelle réglementation environnementale des bâtiments dite « RE 2020 ».
On le constate : la politique climatique est continuellement en débat dans diverses institutions. Mais dans cette avalanche de lois et de réglementations, beaucoup de mesures sont inconnues du grand public. Qu’a changé la Convention citoyenne ? Elle a certes formulé des propositions déjà présentes dans le débat d’experts, mais en les abordant à travers le prisme du quotidien des Français. Et non en défendant les intérêts d’une quelconque structure.
Cela n’a pas empêché le gouvernement d’annihiler l’ambition des 150 citoyens. De nombreux détails restent donc à améliorer. Voici quelques questions que cette expérience a soulevées. Faut-il multiplier ce type de consultation ? Pour quels sujets ? Combien de citoyens faut-il réunir pour être représentatif sans alourdir le processus ?
Autres questions : comment les informations diffusées à cette occasion peuvent-elles bénéficier à l’ensemble de la population ? L’important n’est pas de constituer un petit groupe de citoyens experts, mais de permettre à tous les Français de s’approprier l’enjeu. Et comment articuler le travail de ces citoyens avec celui des acteurs plus traditionnels de la société civile, comme les associations, syndicats et autres corps intermédiaires ? Par exemple, comment faire le lien avec le Conseil économique, social et environnemental (Cese), qui réunit déjà diverses composantes de la société civile ?
La Convention citoyenne pour le climat aura ouvert des pistes de réflexion. Espérons qu’elles ne soient pas refermées aussi vite qu’ont été douchés les ambitieux espoirs de ces 150 citoyens.
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