A l’heure où l’interdépendance du vivant devient de plus en plus concrète, nous avons pu constater que la nature se porte mieux quand on la laisse respirer et que les animaux reprennent leurs droits quand on les laisse exister.
par Sabine Brels *
Avec l’épreuve du Covid-19, la leçon semble assez forte pour réaliser que notre modèle de société doit changer. Pourquoi ? Simplement parce qu’il n’est pas soutenable et parce qu’on ne peut plus durablement continuer comme ça.
On sait aujourd’hui que la surexploitation des animaux sauvages et des animaux d’élevage accroît l’apparition des zoonoses, c’est-à-dire des maladies animales transmissibles aux humains, avec des conséquences parfois gravissimes. Si à ce jour, des questions demeurent encore sur l’origine du Covid-19, les derniers rapports de l’OMS nous disent que ce virus proviendrait de la chauve-souris avec un intermédiaire qui reste à identifier. Quoi qu’il en soit, le lien de causalité a déjà été établi par de nombreuses épidémies avant celle-ci, comme Ebola, H1N1, la grippe aviaire et bien d’autres encore et ce depuis fort longtemps.
Ce qui est certain, c’est que si nous ne changeons rien, la situation ne va pas s’améliorer.
Bien au contraire. En continuant à ce rythme, le risque de nouvelles pandémies mortelles n’ira pas en s’atténuant.
Aujourd’hui, l’Organisation mondiale de la santé animale nous alerte sur le fait que 75 % des maladies infectieuses émergentes sont d’origine animale. Des animaux qui ne sont pas venus à nous mais que nous sommes allés chercher. Et malgré les précédents avertissements, nous avons continué.
Alors comme tout le monde je me questionne et je me demande si nous avons enfin compris, de manière collective, la leçon de l’histoire et surtout ce qu’elle vient nous apprendre ?
Pour moi la conclusion est claire et il faut nous rendre à l’évidence :
La surexploitation des animaux telle qu’on la maintient aujourd’hui mène à notre propre extermination.
Cela se vérifie de plus en plus que ce soit au niveau alimentaire, écologique et sanitaire.
Dans le contexte du Covid-19, la Chine a adopté le 24 février 2020 une décision interdisant le commerce et la « mauvaise habitude » de consommer des animaux sauvages pour assurer la sécurité de la vie et la santé des personnes (1). Afin de faire appliquer cette décision et parler des autres mesures à prendre, nous venons de participer à un cycle de conférences en ligne avec la Chine et des experts internationaux en protection animale pour « un futur sans pandémie » (2).
Il en ressort que tout le monde est désormais d’accord avec ce que nous mettons en avant depuis plusieurs années déjà, à savoir que, face à une problématique globale, nous avons besoin d’une solution globale.
Alors comment faire ?
Pour le savoir, on peut regarder comment nous avons déjà fait pour des grandes questions mondiales comme les droits de l’homme et les problèmes environnementaux.
La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, la Convention sur la Diversité Biologique et la Convention-Cadre sur les Changements Climatiques ont été adoptées. Où ça ? A l’ONU.
Car c’est à l’ONU, qui est l’organisation universelle par excellence qui réunit tous les pays du monde, que les grandes problématiques universelles sont traitées. Or il n’existe encore à ce jour aucune protection globale des animaux.
C’est pourquoi l’association Global Animal Law (GAL) sur le droit animal global, que nous avons fondée avec son président Antoine Goetschel, propose d’adopter une Convention sur la santé et la protection des animaux à l’ONU, appelée UNCAHP, de son acronyme anglais UN Convention on Animal Health and Protection.
Cette initiative, lancée depuis 2018, a été rédigée par plusieurs experts internationaux en droit animalier. Elle vise à protéger la santé globale, en lien avec la santé humaine et environnementale, ainsi que le bien-être de tous les animaux, en tant qu’êtres sensibles.
Qu’il s’agisse des animaux de compagnie, d’élevage, d’expérimentation, de spectacle ou des animaux sauvages, tous doivent être protégés contre les actes de cruauté dont ils souffrent partout dans le monde.
C’est pourquoi ce projet de convention prévoit des interdictions générales de maltraitance avec des obligations de bientraitance des animaux dans tous les domaines. Elle prévoit aussi la défense des intérêts fondamentaux des animaux et prône la recherche d’alternatives aux produits et à l’exploitation animale.
En prenant conscience des liens d’interdépendance qui nous unissent, nous réalisons que mieux respecter les animaux et la planète, c’est aussi prendre part à un plus grand respect de nous-mêmes.
Afin de contribuer à créer un monde meilleur pour les générations présentes et futures, un monde où les humains et les animaux pourraient cohabiter en harmonie dans un environnement sain, nous avons besoin d’aller voir les gouvernements pour les convaincre d’adopter cette convention et faire de la protection des animaux et de la santé globale une nouvelle mission universelle.
Si vous voulez contribuer et soutenir ce projet, vous pouvez aller sur le site du GAL pour en savoir plus et y participer pour que les animaux voient aussi leurs intérêts protégés à l’échelle mondiale, et ce pour le plus grand bien de tous.
Merci !
* Docteure en droit international animalier et cofondatrice-Global Animal Law (GAL), Sabine Brels était l’une des intervenantes du colloque organisé en 2018 par les JNE sur la condition animale.
Contact : sb@globalanimallaw.org
Cette tribune est disponible ici en version audio sur le site de la radio Parole d’Animaux.