Voici la version intégrale du texte que nous avait adressé Alain Hervé (décédé le 8 mai 2019) pour la rubrique « Grands Témoins » de l’édition 2017 de l’annuaire des JNE.
par Alain Hervé, membre de JNE, fondateur du journal Le Sauvage.
Je suis né en 1932 les pieds dans la mer à Granville.
Pour ce qui est du journalisme : après des études de philosophie à la Sorbonne avec Gaston Bachelard, et un diplôme du CFJ, je commence par La Vie catholique illustrée en 1956, je démissionne au bout de trois mois. Puis Paris Normandie, je démissionne au bout de trois mois, après avoir refusé un cigare que m’offrait le directeur qui n’écoutait pas ma demande
d’augmentation. 1957 : service militaire en Algérie où sur ordre de Delouvrier, je crée Femmes Nouvelles, un mensuel pour les femmes musulmanes.Une fois libéré en 1960, repasse un an par la Vie catho, démissionne. Reporter à Réalités pendant deux ans, démissionne pour faire un tour du monde à la voile de trois ans, que je publie dans Neptune Nautisme. 1967 : pigiste, 1968 : Cérès, revue de la Fao à Rome, démissionne en total désaccord avec la politique de développement agricole de cette agence des Nations Unies.
1969-71 : pigiste Le Nouvel Adam, Planète, Réalités.
1970-71 : je crée les Amis de la Terre et le journal le Courrier de la Baleine.
1972 : Entrée au Nouvel Observateur.
1973 : création et direction du Sauvage jusqu’en 1981.
1982-1985 : co-rédaction en chef des grands reportages à Géo.
1989 : je crée Fous de Palmiers et la revue le Palmier.
1985-1993 : rubrique mensuelle dans Grands Reportages et piges dans le Monde, Normandie Magazine, Côté Ouest, Vogue.
1991 : la Lettre du Sauvage.
Depuis 2009 : Le Sauvage.org sur internet. Chronique dans chaque numéro de l’Ecologiste.
J’ai publié une vingtaine de livres à commencer par l’Homme sauvage (1979) jusqu’à Promesse d’îles en 2016.
Pour ce qui est de l’écologie : ma jeunesse au bord d’une mer à marées grandioses, m’a familiarisé avec la nature vierge, en particulier aux îles Chausey. Il en est résulté un appétit des espaces ouverts et une méfiance pour les villes et les entreprises humaines. Je lisais Montaigne plutôt que Sartre, Monfreid et Cendrars plutôt que Marx. Le journalisme n’a jamais été pour moi ni un métier ni un travail mais une position extraordinaire pour observer le monde et la vie des hommes et y participer. Ce fut une passion, un bonheur qui petit à petit se sont exprimés dans le sens de la prise de conscience écologique naissante.
Après avoir créé les Amis de la Terre j’ai rêvé de lancer un grand magazine style Match pour répandre la bonne parole. Ce fut le Sauvage grâce à Philippe Viannay et Claude Perdriel. Ce fut un échec car les intellectuels dominants ont vu dans l’écologie une menace électorale pour la gauche et ses vieilles bastilles. Et le public ivre des délices de la modernité, une menace pour son tout neuf paradis de la consommation. Le Sauvage, jamais plus de 45.000 exemplaires vendus. Je me suis à cette époque inscrit à l’association de l’ami Pierre Pellerin, l’AJEPN (NDLR devenue les JNE) de 1971 à 1995 pour rencontrer tous ceux qui chacun à leur manière commençaient à exprimer les mêmes convictions. Je me suis réinscrit aux JNE en 2008, pour rencontrer ces phénomènes qui ont mieux compris ce qui se passait, que toute notre classe politique bouchée à l’émeri à propos de l’écologie.
Je crois que nos idées cheminent en profondeur et que la réflexion se trouve précipitée par la faillite des modèles de gestion dits modernes des sociétés humaines.