Notre « revue de web » consacrée aux articles des membres des JNE sur la nomination de Nicolas Hulot au gouvernement a suscité des réactions en cascade que nous vous livrons ci-dessous.
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Christel Leca a été la première à s’exprimer.
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Ça montre bien la diversité des JNE, c’est intéressant !
J’aurais aussi souligné le fait que participer à ce gouvernement néolibéral est en contradiction avec ce qu’Hulot semblait penser, il y a peu, à travers l’Appel aux solidarités ou mieux encore le Syndrome du Titanic, comme dit Hervé Kempf : « Reste que le choix individuel croise une situation générale : en apportant son poids à Emmanuel Macron, Nicolas Hulot conforte un camp dont l’orientation est globalement néolibérale et à peu près opposée à ce qu’il pense, si l’on en croit le film qu’il a réalisé en 2009, Le Syndrome du Titanic, et son récent Appel aux solidarités. » Ce qui ne me semble pas le moindre « oxymore » (mais on vit dans son règne) de la situation !
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Dans un message suivant, Christel Leca a ajouté :
Pas mal aussi le papier de notre ami Maxime Combes 😉
http://blogs.mediapart.fr/maxime-combes/blog/170517/nicolas-hulot-au-gouvernement-de-la-confusion-et-des-exigences-politiques-clarifier
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La réaction de Christel Leca a suscité cette réponse de Frédéric Denhez :
Salut Christel,
Certes, tu as raison, ainsi qu’Hervé, mais il y a un air du temps que l’on sent sur le terrain, celui des initiatives spontanées, privées, publiques, particulières, associatives, qui, pour pallier la crise et l’abandon de l’État, développent des réponses basées sur les relations entre gens « qu’on connaît » et qui, de fait circonscrites dans un territoire de vie réduit, le font redécouvrir et, de là, considérer l’écologie comme une vision de long terme à la fois dans le passé (ce qu’on a fait), et dans l’avenir (ce dont on a envie pour nous tous). L’écologie en filigrane, comme trame pour retisser de clients entre les gens et entre eux et leur lieu de vie. Ces initiatives font tellement sens aujourd’hui qu’elles emmerdent l’État, qui veut les encadrer par des appels d’offre et des critères de performance, et ont sans aucun doute contribué à pousser Macron à l’Élysée. Or, cet air du temps, c’est bien celui que travaille la FNH, sur le terrain (cf partenariat avec l’UNCPIE) et Hulot.
J’ai fait un papier sur un exemple précis, celui de la Scic Rhizobiome, dans une récente infolettre parue également sur mon blog http://blogs.mediapart.fr/frederic-denhez/blog/020517/biodiversite-l-etat-veut-il-decourager-l-action-sociale. Révélateur, me semble-t-il.
Par ailleurs, comme je le dirai dans CO2 Mon Amour (NDLR : à écouter ici) – je serai technique, comme d’hab’, il y a quand même des choses qui sont révélatrices :
ministère d’État, ce qui rendra Hulot supérieur hiérarchiquement aux autres ministères, et donc au même rang que le Premier ministre quant aux arbitrages ;
– intitulé intéressant (« solidaire » ) qui enfin fait le lien entre écologie et social, vous savez peut-être ma position là-dessus depuis toujours, qui m’a longtemps valu l’hostilité de beaucoup d’écolos pour qui le social et donc la politique avec un grand P, n’est pas une dimension d’un discours écolo circonscrit à l’eschatologie et au naturalisme gnangnan – il faudrait qu’un jour je raconte la rédaction de mon dernier livre avec FNE (…) ;
– intitulé intéressant du ministère de l’agriculture (agriculture et alimentation), qui fait le lien entre l’assiette et le paysage, en vue d’un Grenelle dont il ne peut sortir que du bon ;
– ministère de transports de plein exercice, avec enfin, connaissant la ministre (NDLR : Elisabeth Borne), une dimension « mutimodale », « énergie » et « logistique» assumée.
Croisons les doigts, camarades, c’est moins fatigant que de lever le poing !
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Voici enfin la réponse de Fabrice Nicolino à Frédéric Denhez.
Frédéric,
Comme je suis aussi destinataire, je me permets de souligner que tout le monde ne partage pas cette énième illusion, qui arrange tant d’affaires personnelles. Et je te prie, et je prie tout le monde de ne pas s’en tenir à une commode opposition factice entre pragmatiques et intégristes. Pour ma part, moi qui suis un mécréant, j’ai créé en 2009 une revue – Les Cahiers de Saint-Lambert – avec un prêtre catholique, Dominique Lang (NDLR : lui aussi membre des JNE). Son sous-titre : Ensemble face à la crise écologique. Le clivage n’oppose donc pas une supposée pureté et une introuvable traîtrise. L’opposition, car il en est une, entre des gens comme toi et des gens comme moi, est autrement fondamentale. Je remarque avec une pointe de tristesse qu’aucun aficionado de la séquence en cours n’explique rien. Ne dit rien sur la marche réelle du monde, la structuration de l’économie et ses poids lourds, les forces sociales en présence, les traités commerciaux qui sont autant de combustible pour le dérèglement climatique, la mort accélérée – restons une seconde en France – des oiseaux, papillons, abeilles, grenouilles, hérissons, ni rien bien sûr du Sud et de ces paysanneries que les politiques à venir du tandem Le Maire-Darmanin continueront de bastonner. Et cela n’a rien d’étonnant, car cela les intéresse bien moins que leurs aventures picrocholines, ici et maintenant.
Frédéric, ce n’est pas une affaire personnelle, et je n’ai aucune animosité contre toi. Je crois t’avoir montré plutôt de la sympathie. Mais je dois avouer que je suis fatigué de tant de bullshit.
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