Lancer des boules de neige ou des alertes ?

 


par Catherine Lesvesque

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En début d’année, il est tombé de la neige industrielle, pas les flocons blancs qu’on aime modeler, les mains gantées, pour en faire des boules. On a trouvé des phtalates chez des insectes d’une réserve naturelle guyanaise, à mille lieues de toute forme d’activité humaine. Une étude de l’Inra a pointé les risques de l’ingestion du nano-dioxyde de titane (E171) chez l’homme. Et l’on soupçonne les insecticides néonicotinoïdes, dont on connaît les dégâts sur les pollinisateurs et les organismes aquatiques, d’être aussi dangereux pour les humains, avec de graves effets neurologiques.

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Comme je l’écris dans la postface de mon Grand livre antitoxiques (éditions Leduc.s), qui sort le 7 mars en librairie, j’ai eu un mal fou à conclure cet ouvrage. L’émission coup de poing de Cash Investigation sur les pesticides, diffusée il y a un an sur France 2, en avait déclenché la rédaction : il fallait donner des clés au plus grand nombre pour éviter autant que possible les toxiques du quotidien.

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Sensibilisée à ces questions à titre personnel (mon père est décédé d’un cancer de l’amiante quand j’avais 28 ans) et professionnel (j’ai traité certains de ces sujets pour La Maison du cancer, parrainée par Bernard Giraudeau), j’ai construit un guide grand public qui s’appuie à la fois sur des références (Marie-Monique Robin, Fabrice Nicolino) et sur les toutes dernières actus, particulièrement foisonnantes ces douze derniers mois.

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Glyphosate, particules fines, perturbateurs endocriniens… Chaque jour ou presque, une nouvelle information, un rebondissement m’invitait à remettre l’ouvrage sur le métier, à le compléter, tantôt pour dénoncer un recul (comme le vice de forme qui a torpillé la disposition introduisant 20 % de produits bio dans la restauration publique collective…), tantôt pour saluer une avancée (comme la mise en place, fin janvier, de la Commission nationale de déontologie et des alertes en matière de santé publique, qui annonce une meilleure prise en compte des lanceurs d’alerte).

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Au-delà d’une approche résolument pratique, j’ai eu à cœur d’offrir plusieurs niveaux de lecture : des éclairages sur la législation (mouvante) en vigueur, des glossaires, des rappels historiques pour prendre de la hauteur et éduquer le « consom’acteur ».

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Préfacé par Allain Bougrain Dubourg (NDLR : membre des JNE), ce panorama des toxiques offre, en dépit de la gravité de son propos, des respirations humoristiques tant dans le texte que dans les dessins joyeusement concoctés par Coco (NDLR : dessinatrice à Charlie Hebdo).

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Face à l’irresponsabilité des politiques et aux incohérences des pouvoirs publics, la lutte passe à mon sens par l’éducation et la transformation des consommateurs en écocitoyens avisés. Pour preuve, le fabricant des bonbons Têtes brûlées a retiré en janvier le E171 de sa fabrication.

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Souhaitons que les débats électoraux à venir, puis le mandat qui suivra, prennent enfin à bras le corps ces enjeux de santé publique dont les coûts – humains et financiers – reposent actuellement bien plus sur les citoyens que sur l’État ou les entreprises privées. Je caresse l’espoir qu’un jour ce livre perde sa raison d’être. Pour lancer des boules de neige immaculée, plutôt que des alertes.

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Journaliste et auteure, Catherine Levesque vient de publier Le Grand Livre des toxiques (éd. Leduc.s).
Retrouvez Catherine sur son blog : www.hoazin.fr /
Sur Facebook : http://www.facebook.com/catherine.levesque.journaliste /
Sur Twitter : @levesquecathy

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