Le scandale de Notre-Dame-des-Landes

Après le Larzac, Plogoff, Serre de la Fare, voici maintenant Notre-Dame-des-Landes. Même combat. Même entêtement des promoteurs, qui veulent absolument se lancer dans une vaste opération immobilière et un équipement surdimensionné par rapport aux besoins réels.

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par Roger Cans

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non-landesLe projet, qui remonte au temps du Concorde, n’a plus de raison d’être. Déplacer un aéroport du centre-ville dans le bocage est une aberration pour la clientèle, déjà habituée au TGV. Un aéroport commun à Nantes et Rennes ? C’est une farce. Le TGV va aussi arriver prochainement à Rennes.

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Les habitants de Nantes en ont assez de voir passer les avions. Et alors ? Les habitants de Choisy-le-Roi et de Palaiseau en voient passer beaucoup plus avec la plate-forme d’Orly, très bien reliée à la capitale. J’ai habité Nice, où l’aéroport de la Côte d’Azur est depuis longtemps le deuxième aéroport international de France. Les habitants de Nice, notamment dans le quartier de la Californie, sont aux premières loges pour le bruit des avions. Mais ils savent que l’aéroport est vital pour l’économie de la ville et ils s’en accommodent. De toute façon, il est impossible de transférer les pistes ailleurs, dans la montagne. Mais, comme le trafic aérien a décuplé, il a fallu agrandir l’aéroport. Et l’on a alors décidé de construire une nouvelle piste en pleine mer, moyennant un apport colossal de matériaux pour combler la fosse méditerranéenne – ce qui n’a pas été sans mal.

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A Nantes, il n’y a pas de fosse marine. Agrandir l’aéroport ne pose aucun problème technique. Mais la municipalité espère récupérer des terrains avec le transfert de la plateforme à une quinzaine de kilomètres de là, dans des prairies humides peu favorables à des pistes d’atterrissage. Comme il n’y avait pas d’urgence (on est loin de la saturation à l’aéroport de Nantes), les choses ont traîné, jusqu’à ce qu’une conjoncture politique favorable se présente : le maire de Nantes nommé premier ministre d’un gouvernement de gauche. D’où la relance d’un projet mille fois examiné, reporté et réexaminé.

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La France, depuis le plan Marshall et l’installation du quartier général de l’OTAN (le SHAPE), en 1949, est dotée d’une multitude de plateformes aéroportuaires, souvent transformées en terrains militaires dormants ou en parkings utilisés pour les grands rassemblements gitans. Chez nous dans la Sarthe, l’aéroport du Mans ne sert plus qu’à accueillir – à grands frais – des avions privés de plus en plus rares. Même La Flèche a son aérodrome, utilisé pour les sports aériens. Les pistes peu fréquentées abritent une flore intéressante, dans la mesure où l’aérodrome n’est qu’un terrain d’atterrissage enherbé.

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Dans une région où l’on construit la ligne à grande vitesse Le Mans-Rennes, où l’on a tracé une autoroute (A 28) pour relier Caen à Tours, on nous demande maintenant de participer au financement d’un équipement ruineux, inutile et même nuisible à l’environnement, au profit du transport aérien ! Trop, c’est trop. Le gouvernement, à quelques mois d’une échéance électorale décisive, ne va tout de même pas se donner le ridicule d’évacuer manu militari les défenseurs de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes.

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Même Mitterrand avait compris en 1981 qu’il fallait renoncer à des projets contestés – à juste titre – et il avait mis un terme au long combat du Larzac (dix ans) et au projet de Plogoff, qui aurait défiguré la Pointe du Raz, aujourd’hui devenue Grand site de France. Son gouvernement avait aussi renoncé au barrage de Serre de la Fare, qui devait engloutir 14 kilomètres des gorges de la Loire, « dernier fleuve sauvage d’Europe ». Que le gouvernement abandonne maintenant, pendant qu’il en est encore temps, le stupide projet de Notre-Dame-des-Landes.

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