Tribunal International Monsanto : des témoins racontent leur combat pour la santé

Voici un nouvel article d’une journaliste JNE, en l’occurrence notre Présidente, présente à La Haye pour le Tribunal International Monsanto.

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par Carine Mayo

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Tribunal International Monsanto à la Haye – 15 octobre 2016 – photo Carine Mayo

« Nous sommes en face d’une épidémie de malformations induite par l’homme. Je ne trouve pas normal que ce soit à des individus isolés comme nous de tirer la sonnette d’alarme. » Sabine Grataloup est venue témoigner du calvaire subi par son fils Théo, né avec une malformation de l’oesophage, alors que son petit garçon âgé de 9 ans va subir dans quelques jours sa 51e opération.

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C’est par ce témoignage fort que le Tribunal international Monsanto a ouvert sa session. Directrice d’une agence de tourisme équestre, Sabine utilisait chaque année un produit à base de glyphosate pour désherber sa carrière d’équitation, un produit qu’elle avait choisi parce qu’il lui semblait « le moins nocif et le plus biodégradable ». Cette année-là, elle a répété ce traitement phytosanitaire en lequel elle avait toute confiance. Elle ne savait pas qu’elle était enceinte. Or, c’est justement à la 3e et 4e semaine de grossesse que se forment l’oesophage et la trachée, explique-t-elle. Pour elle, il n’y a pas de doute : « toutes les études m’amènent à considérer que ce qui est arrivé à Théo n’est pas un cas isolé.»

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Après elle, vient un autre témoignage semblable, celui de la maman d’une petite fille en Argentine, née elle aussi, avec une affection à l’oesophage, alors qu’elle résidait à proximité d’entrepôts contenant de l’herbicide et que les pulvérisations de ce produit étaient fréquentes autour de son village. « Il faut se battre pour la santé. Je ne veux pas qu’il y ait d’autres Martina », déclare la jeune femme. Et de dénoncer : « Dans notre pays, on ne nous écoute pas. Il n’y a pas les lois dont nous avons besoin. »

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C’est justement parce qu’il y a, à leurs yeux, une carence du droit qu’ils sont venus témoigner ici au Tribunal International Monsanto à La Haye. Tel Damian Verzenassi, ce médecin argentin, qui a expliqué que le nombre de fausses couches, de malformations à la naissance et de cancers a explosé dans son pays, où règnent la culture de soja OGM et les épandages de glyphosate. Ou encore Christine Sheppard, agricultrice américaine, victime d’un lymphome non-hodgkinien, qui avoue ne plus sortir de chez elle, car son système immunitaire est devenu très fragile à la suite de sa maladie et des traitements qu’elle a reçus. Vu l’importance de l’enjeu, elle a cependant accepté de venir témoigner, elle aussi.

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« La fonction de ce tribunal n’est pas de condamner, mais de dire le droit », a déclaré l’avocate Corinne Lepage, en ouverture de ce procès symbolique, tout en regrettant l’absence de représentants de Monsanto. Les juges – de vrais magistrats aujourd’hui à la retraite – devront se prononcer sur la conformité des actions de Monsanto face aux règles de droit international et de droit privé. Les organisateurs de cet événement ont ainsi l’espoir de faire évoluer les règles de droit et de permettre aux victimes des produits phytosanitaires d’aller faire reconnaître les atteintes dont ils ont été victimes devant la justice.

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Mais l’application du droit est liée au bon fonctionnement de la démocratie, comme l’a rappelé Marcelo Firpo, chercheur et représentant de l’association de santé publique ABRASCO au Brésil. Beaucoup de témoins ont ainsi dénoncé la collusion entre les Etats et la multinationale.

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Toutefois, l’exemple du Sri Lanka est venu apporter une note d’espoir. Après une recherche ayant montré un lien entre des maladies rénales et la contamination de l’eau par le glyphosate, le gouvernement a interdit l’importation de cette substance.

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