Les Grands Voisins, un quartier vert et solidaire

Lieu d’innovation sociale et écologique, ce site unique a ouvert ses portes aux JNE. Compte-rendu de cette visite réalisée le 8 juin 2016.

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par Carine Mayo

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Carton plein
L’association Carton plein, aux Grands Voisins (Paris XIVe) © Carine Mayo

Une vraie ruche ! A l’entrée de ce site, caché par des murs, avenue Denfert-Rochereau, à Paris, c’est un va-et-vient permanent. Pas étonnant !

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L’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul accueille aujourd’hui 600 habitants, des personnes sans domicile, des travailleurs étrangers, mais aussi des artistes, des associations et des entreprises de l’économie sociale et solidaire, comme Carton plein, qui donne une seconde vie aux cartons usagés et emploie 10 personnes en insertion sur ce site.

 

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Atelier artiste
Atelier d’artiste sur le site des Grands Voisins (Paris XIVe) © Carine Mayo

Au total, plus de 1000 personnes fréquentent chaque jour ce site. Dans la Lingerie, reconvertie en café, les animateurs de ce projet innovant, qui a pris forme en une année, nous présentent le site. Sa gestion est confiée à l’association Aurore spécialisée dans l’hébergement et le soin des personnes en situation de précarité, aidée de l’association Plateau urbain qui s’occupe de l’aspect économique et contribue au choix des autres occupants (artistes, associations et entreprises) et du collectif Yes we camp, chargé de la cohésion entre les différents publics.

 

 

Lingerie
Le restaurant la Lingerie, aux Grands Voisins (Paris XIVe) © Carine Mayo

Ici, pas de fronde des habitants, comme dans le XVIe arrondissement de Paris. Sans doute parce que les Parisiens ont été associés dès le départ au projet.

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Aujourd’hui, ils peuvent venir boire un verre ou déjeuner à la Lingerie, acheter des vêtements à la Ressourcerie ou des plantes à Mama Petula…

 

 

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Mama Petula
Mama Petula, aux Grands Voisins (Paris XIVe) © Carine Mayo

C’est sur demande qu’est née lors d’un Conseil des voisins, l’idée de développer l’agriculture urbaine sur le site. Depuis le mois de janvier, plusieurs associations développent des projets sous la houlette d’Oscar Landais, chargé de l’aménagement des espaces extérieurs.

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Philippe Gibert, de l’association Abeille Francilienne, fait des animations pour le public autour des deux ruches qu’il a installées à l’entrée du site. Avec cinq ruchers dans Paris, cette association compte aider au développement des populations d’abeilles dans la capitale.

 

Léa Teillet (association Aurore) devant les kits de « la Boîte à Champignons » © Carine Mayo

Depuis 2015, la société Upcycle commercialise sur internet des kits pour faire pousser des champignons sous la dénomination La Boîte à Champignons.

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Avec deux résidents, employés 6 heures par semaine, Léa Teillet, de l’association Aurore, va récupérer du marc de café dans les bistrots du coin, pour l’ajouter au substrat qui leur est fourni en même temps que les kits.

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Le poulailler est apprécié par les résidents © Richard Bonnet

Amélie Anache et Loubliana Petroff font partie de l’association Pépins production, qui cherche à développer des pépinières de quartier. Le but ? Apprendre aux gens à faire des semis et fournir des plants issus de graines bio ou non traitées et de substrats issus de déchets urbains aux habitants de la ville. Ainsi, elle approvisionne NaturEspaces, une autre structure qui jardine avec dix personnes en insertion sur le site.

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Nina Gicquel, qui travaille pour cette entreprise d’insertion, explique que le but est de professionnaliser des jardiniers, ce qui n’est pas évident avec des personnes qui ont parfois des années de rue derrière elles. Prendre soin des plantes, c’est une façon de redonner de la dignité aux personnes qui ont connu l’exclusion sociale.

 

Miel de quartier Grands Voisins
Les ruches de l’association Miel de quartier © Carine Mayo

Jérôme Veil, de l’association Miel de quartier, cherche à promouvoir « une apiculture qui s’appuie sur l’agroécologie et la permaculture ».

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Il veut initier des personnes en difficulté à ce métier car « on manque d’apiculteurs pour installer des ruches en entreprise ».

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Lucas Manganelli, de l’association Ici Terre, a créé des buttes de permaculture et développé un projet pour apprendre à cultiver des jeunes pousses en appartement. Une source de verdure et de vitamines intéressante pour les citadins. La philosophie de ce praticien de la médecine chinoise ? « Vivre et agir joyeusement dans son environnement ».

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Le module aquaponique de l’association Zone-AH! © Carine Mayo

Bruno Vitasse, de l’association Zone-AH!, cherche à développer la valorisation des drêches de brasserie, c’est-à-dire le résidu organique du brassage du malt, qui peut être utilisé parmi de nombreuses applications comme substrat ou paillage pour le potager.

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L’association travaille également sur l’aquaponie, une technique qui consiste à faire pousser des légumes grâce à leur fertilisation par l’eau d’élevage de poissons, enrichie par leurs excréments. Dans la serre dédiée à l’aquaponie, avec l’association de biohackers La Paillasse, qui gère cette installation pour les besoins du projet OpenAquaponie, il va tester l’usage des drêches pour l’alimentation des poissons et en substrat pour la culture hors-sol

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Ici, on innove sans cesse et on teste des solutions qui pourraient inspirer un nouveau modèle urbain, plus écologique et solidaire. Mais toutes ces initiatives sont destinées à rester éphémères, car la convention avec l’Etablissement Foncier d’Ile-de-France, propriétaire des lieux, prend fin en juin 2017, date à laquelle commenceront les travaux de construction d’un écoquartier. Mais cela n’entame pas l’enthousiasme des porteurs de projets. « On voudrait montrer que ça fonctionne et que c’est reproductible ailleurs », explique Florie Gaillard, chargée de communication aux Grands Voisins pour l’association Aurore. Et quand on leur demande s’il n’y a pas de risques de conflits à la fermeture du site, tous assurent qu’il n’en sera rien. « La spécialité des structures comme Aurore, Plateau urbain et Yes we camp, c’est d’occuper temporairement des sites. »

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Les associations pensent toutefois que certaines activités pourront continuer pendant la construction de l’écoquartier qui durera jusqu’en 2022. Le temps de continuer d’innover et d’essaimer. En attendant, ceux qui veulent s’informer sur la vie du site peuvent venir y assister à une animation ou prendre un café. « Le bar est une vitrine de nos activités. On prend du temps pour discuter avec les gens et expliquer le projet », explique Elena Manente, chargée de communication aux Grands Voisins pour l’association Yes We Camp.

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Hamacs
Le site est ouvert aux touristes qui peuvent y dormir dans un hamac © Carine Mayo

Des moments qui ne sont pas réservés aux Parisiens.

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En effet, le site est également ouvert aux touristes qui peuvent y passer une nuit sous tente ou dormir dans un hamac dans une cabane en bois pour 8 euros.

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« Les touristes vont parler du projet ailleurs », souligne Elena. Un bon moyen de propager les pratiques et les idées développées aux Grands Voisins !

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Merci à Florie Gaillard de l’association Aurore, Jean-Baptiste Roussat de Plateau Urbain, Elena Manente et Oscar Landais de Yes we camp pour avoir organisé cette visite.

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