Les quatorzièmes rencontres de l’écologie au quotidien ont rassemblé à Die (26), du 22 au 31 janvier, 2016 près de 11 000 personnes. Elles avaient cette année pour thème : « Changer de vision … pour un monde solidaire ». Catalyseur de liens et d’initiatives nouvelles entre les acteurs de la transition écologique, cet événement est pensé par ses organisateurs comme un outil d’éducation populaire.
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par Jean-Claude Noyé
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Le moins qu’on puisse dire est que le programme était riche et qu’il y en avait pour tous les goûts. Dans la salle polyvalente de Die, le lieu principal de la manifestation décoré pour la circonstance de tentures couleur safran ou bordeaux, les conférences se sont enchaînées.
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Entre celle donnée en ouverture par Olivier de Schutter, ancien rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentation et professeur à l’Université de Louvain (Belgique), avec pour thème «La dimension humaine de la transition écologique » (voir son texte ici). Et celle intitulée « Sortir de la Seulitude », donnée dimanche par une animatrice de la communauté de l’Arche.
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Au programme également, la diffusion de films et la tenue d’ateliers pratiques : « Echanges autour du pain et des blés anciens » ; « Mieux être et pleine conscience » ; « Explorer les énergies féminines et masculines en soi et avec les autres », etc. Sans oublier les temps festifs et dansants (bals folk). Convivialité et confiance, tels sont les maîtres mots de ces rencontres. Confiance réaffirmée dans notre capacité collective à inverser le cours des choses pour préparer l’avènement d’une société post-capitaliste. Confiance dans la capacité des personnes à se responsabiliser que symbolise, par exemple, l’accès libre aux thé, café et autres infusions, moyennant la somme que chacun veut bien donner.
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Le genre de petites choses qui vous mettent le coeur au diapason et qui, outre, la qualité tant du programme que de l’accueil, vous donnent envie de revenir l’année suivante. Toujours est-il que la fréquentation de cette manifestation atteint un niveau élevé avec près de 11 000 participants cette année, si l’on en croit les organisateurs. Tout a commencé à la fin des années 90 quand les acteurs de la transition écologique de ce territoire rural, pour beaucoup des néo-ruraux arrivés dans les années 70, ont pris conscience qu’ils étaient dispersés et qu’il leur manquait une vision globale. Qu’il leur fallait créer ensemble de nouvelles cohérences, fussent-ils élus locaux, paysans bio, entrepreneurs dans le domaine des plantes cosmétiques et médicales, créatifs culturels et autres animateurs d’association à finalité socio-éducative. Dès leur création, les Rencontres de l’écologie ont été un catalyseur d’énergies et de projets. La venue de personnalités reconnues, comme Jean-Marie Pelt, Patrick Viveret, Pierre Rabhi, Michèle Rivasi, le soutien constant d’Edgar Morin, ont fait le reste …
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Enfant du pays, militant dans l’âme (il a entre autres participé à la création de la Confédération paysanne, du parc naturel régional du Vercors et de la Carline, une coopérative de produits bio), créateur de Médias Citoyens Diois, Claude Veyret est impliqué au premier chef dans la bonne marche de cet évènement, aux côtés d’Anne Tesson. Il rappelle l’importance qu’a eu pour eux le livre de Félix Guattari : Les trois écologies. « L’écologie personnelle telle qu’elle peut se cultiver dans la communication non-violente (CNV), la méditation en pleine conscience et, plus globalement, par une attitude bienveillante avec les hommes comme avec la nature, est une dimension indispensable. Elle impacte tout le reste. A quoi bon manger bio si on est fâché avec son voisin ? », interroge-t-il. Et d’expliquer que le changement de paradigme ne viendra pas d’en haut mais, bel et bien, de la base, c’est-à-dire des territoires.
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« Changer de vision pour un monde solidaire » ou comment transformer nos rapports de force en coopération : le choix du thème des Rencontres de l’écologie au quotidien résonne donc avec cette conviction. Laquelle justifie aussi l’importance des ateliers pratiques et activités centrées sur la capacité des individus à se transformer pour construire un nouveau monde. « Pour les méthodes d’animation, depuis toujours nous essayons que tous ces temps de réflexion et dialogue soient les plus participatifs possibles. Word Café, Forums ouverts, Théâtre Forum, échanges en groupes sont des outils couramment utilisés depuis quelques années. Les mises en situation et ateliers de travail par thème aussi », précise encore Claude Veyret.
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L’année 2016 aura été marquée par l’accueil à Die des représentants du Réseau international des éco-régions et bio-districts. Venus d’Italie, de Macédoine, de Chypre, de Lettonie, de Bosnie Herzégovine ou de Belgique, ils ont fait part des expériences de transition écologique initiées dans leurs secteurs. Non sans exprimer leur vif intérêt, sinon leur admiration, pour le programme concerté d’actions menées dans la vallée de la Drôme sous le terme générique de Bio-vallée. Un programme de coopération et de soutien économique entre ces acteurs européens devrait, à terme, voir le jour. Pour les militants écologistes du Haut-Diois et des environs, cette nouvelle mise en réseau ne procède jamais que d’une démarche solidement établie. Celle-là même qui a permis la naissance des Cigales, de Terre de Liens, des Compagnons de la Terre, d’un réseau de permaculteurs. Ou, plus récemment, du réseau diois d’accueil des migrants. Le fil conducteur de toute ces actions ? Un mot, sans doute, l’exprime : éducation populaire. C’est, en tout cas, le terme que Claude Veyret utilise pour résumer les Rencontres de l’écologie au quotidien.
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