Plaidoyer pour la vie en temps de chasse

En cette période d’ouverture de la chasse, voici un texte très personnel d’une adhérente des JNE…

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par Roxane Desbois

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Pour vivre enfin en paix avec les animaux !

Cette nuit à la belle étoile avec les enfants au pied de ma colline boisée s’est achevée en miettes. Dès l’aube, sans cesser pendant des heures, coups de feu secs et rafales de plombs ont déchiré le petit matin, me serrant à chaque fois un peu plus les entrailles. La guerre avait- elle commencé ? Les alarmes des maisons se sont mises à sonner, les plombs ont crépité comme de la grêle sur le toit de la maison, les oiseaux se sont enfuis à tire d’aile, des perdrix en famille ont fini par trouver refuge dans mes bois en poussant leurs petits sons rauques… Puissé-je, en ce jour funeste, accueillir tous les animaux terrorisés dans l’espace de mon coeur! Aujourd’hui, 14 septembre, c’est une drôle de guerre qui a commencé dans le sud de la France ; celle de l’humain contre son alter ego à poil et à plumes. Quand le fusil et les plombs viennent combler les mains vides d’amour, cela finit en hécatombe.

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La France détient aujourd’hui de bien tristes records : 25 million d’oiseaux et 5 millions de mammifères tués chaque année ! 91 espèces chassables, le plus gros chiffre d’Europe, de même que le million de chasseurs qui arpentent nos campagnes ! Une période de chasse qui dure toute l’année, si l’on tient compte des battues administratives et des destructions de nuisibles, et des zones de chasse s’ étendent à la majorité des réserves naturelles et à plusieurs parcs nationaux, ainsi qu’à nos jardins privés où les chasseurs peuvent légalement poursuivre leur proie et les abattre devant les yeux des enfants ! Une quelconque résistance peut nous valoir une amende de 1 500 €. Si, si ! C’est la loi, votée par les députés de l’Assemblée Nationale. Il faut dire que 160 d’entre eux sont des chasseurs ou votent pro chasse ; le plus gros lobby existant en France, tous bords confondus! Que dire des « accidents » mortels liés à la chasse – une vingtaine par an ! Avec des armes qui peuvent tuer un homme à 3 km de distance, on ne doit pas s’étonner.

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Que nous reste-t-il, alors même que le jour national de non-chasse a été aboli par Roselyne Bachelot il y a quelques années ? Nous n’osons plus aller nous promener en nature, certaines forêts sont même interdites à la cueillette des champignons et le ramassage pour préserver le droit des chasseurs. Ne parlons même pas de nos rêves de nuits à la belle étoile ! Face aux armes et au diktat de la terreur, le partage de la nature est un leurre. Et qu’en est-il de la faune sauvage ? Tant de promenades pleines de l’espérance d’une rencontre, et si peu d’animaux croisés dans nos forêts. La différence entre un chasseur et un amoureux de la nature, c’est que quand le premier est passé il ne reste plus rien au second à admirer !

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Nous nous offusquons à distance des atrocités commises sur l’autre rive de la Méditerranée, mais avons-nous pris soin de regarder attentivement sur les rives de notre propre cœur ? Quelle pulsion nous pousse à dégainer nos armes et à tirer sur des êtres vivants, de façon quasi obsessionnelle, dès que le bal est ouvert.

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Quelle dignité y a-t-il à briser la vie et l’harmonie ? Quel courage y a-t-il à appuyer sur une gâchette face à un « cochonglier » appâté au grain ou à un faisan d’élevage relâché la veille ? D’où nous vient cette incroyable indifférence à la souffrance ? Nous exigeons des peuples en guerre qu’ils déposent leurs armes, mais sommes-nous seulement capables de déposer les nôtres un seul jour, ou de nous retenir de tirer sur un animal qui aurait pourtant fait un beau trophée ? Saurions-nous tout simplement ranger notre fusil au placard des souvenirs parce que nous avons compris, enfin, que tout cela était trop laid, trop violent, trop dépassé….
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Je sais que je ne suis pas meilleur que vous. Et c’est parce que je le sais que mon cœur saigne en ce jour. Je suis le chasseur, je suis le guerrier, mais je suis aussi la mère, l’enfant blessé, la biche abattue. Mon cœur saigne de toutes ces blessures infligées en ce jour funeste, ici comme ailleurs, et je demande pardon. Le vrai courage de l’humain – ma vraie dignité, réside dans ma capacité à déposer les armes à l’instant même où je prends conscience de mon iniquité, et à être le premier à le faire. Si je le fais, à l’instant même tous les autres « je » le feront. Il faut du courage pour s’élever contre l’indignité de l’humain et en même temps assez d’amour pour ne pas le lui cracher à la figure ; l’autoriser à se mettre debout en même temps que moi .
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En ce jour, j’ai décidé de jeûner et de prier pour me relever dans ma dignité.

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En ce jour, j’ai décidé de jeûner et de prier pour trouver en moi les ressources qui me permettront de parler avec justesse à celui qui me blesse.

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En ce jour, j’ai décidé d’écrire ces lignes, car il me serait lâche de me taire.

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En ce jour, je jeûne et je prie, pour manifester et transformer ma tristesse et ma colère.

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En ce jour, je jeûne et je prie pour faire contrepoids à la pesanteur des fusils et des plombs.

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En ce jour, je jeûne et je prie comme j’ai jeûné et prié le jour de la reprise de la chasse à la baleine en Islande, ou le jour où le premier loup a été officiellement abattu en France.

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En ce jour, je jeûne et je prie comme j’ai jeûné et prié pour commémorer les bombardements sur Hiroshima et Nagasaki.

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En ce jour, je jeûne et je prie comme je jeûnerai et prierai pour que les hommes déposent leurs armes dans le monde.

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En ce jour, je jeûne et je prie pour que vous, messieurs les chasseurs –messieurs, car les femmes connaissent encore le prix de la vie, retrouviez le courage de la tendresse et de la compassion, le courage d’être plus amoureux et moins prédateurs, le courage de troquer votre fusil contre une virilité faite de sensibilité, d’intelligence, de finesse et d’attention aimante. « Faites l’amour, pas la guerre ! »

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En ce jour, je jeûne et je prie sincèrement pour que les fleurs non encore écloses de notre humanité trouvent leur chemin pour nous conduire à devenir des êtres de paix.

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Puissions-nous tous ouvrir les yeux sur la beauté du monde et des êtres !

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