Depuis début septembre, le climat est particulièrement tendu sur le terrain de la forêt de Sivens, dans le Tarn. Une dizaine d’hectares environ de forêt protégée a été déboisée en toute illégalité, alors que les experts nommés par le ministère de l’Environnement doivent auditionner les associations de défense (Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet, Confédération Paysanne et FNE). Ben Lefetey, porte-parole du Collectif Testet, répond à nos questions.
Propos recueillis par Myriam Goldminc
Les opérations de déboisement s’intensifient et vous affirmez que cela se fait dans la plus parfaite illégalité. Pouvez-vous nous expliquer en quoi cela est illégal ?
Chaque jour, un ou deux hectares disparaissent. Depuis le 1er septembre 2014, date de commencement des défrichements, la Compagnie d’aménagement des coteaux de Gascogne (CACG) procède à la destruction d’espaces boisés pour la construction du barrage de Sivens en parfaite illégalité. Car contrairement aux allégations de Thierry Carcenac, Président du Conseil Général du Tarn, toutes les procédures n’ont manifestement pas été respectées. Nous avons fait constater par huissier de justice, en mairie de Lisle-sur Tarn, ainsi qu’en préfecture l’absence de tout arrêté autorisant la CCAG à réaliser ces défrichements
Quelle est votre stratégie face à ce déploiement de force ?
Sur le terrain, les forces de l’ordre sont omniprésentes. On se trouve face à un déploiement de force militaire impressionnant avec gaz lacrymogènes et flash balls. Environ 150 à 200 gardes mobiles sont sur place.
Il reste encore un campement sur place, mais hier 10 septembre 2014, un chapiteau a été évacué sans mandat avec le propriétaire qui était sur le toit et des gens attachés sur les arbres ont été violemment expulsés.
Aujourd’hui jeudi 11 septembre, vous allez être reçus par les experts nommés par la ministre. Une première victoire ?
Nous demandions cette expertise indépendante depuis un an, mais nous ne verrons pas les experts si ce déboisement illégal continue. Il est hors de question que des discussions aient lieu avec les experts chargés d’évaluer le projet de barrage et notamment son impact environnemental pendant que des machines, en toute illégalité, pilent et broient des espèces protégées et saccagent la zone humide qui les héberge.
Désormais, vous placez votre bataille sur un plan juridique ?
Nos associations portent plainte contre la CACG pour le délit de défrichement sans autorisation et pour la contravention de défaut d’affichage.
Vendredi matin 12 septembre, le tribunal administratif de Toulouse doit se prononcer en audience sur la dérogation préfectorale de destruction d’ espaces protégées que sont les zones humides.
Nous avons aussi l’intention de porter plainte devant le Procureur de la République d’Albi afin de faire renvoyer la CACG devant le Tribunal correctionnel et obtenir réparation du préjudice subi en totale violation des règles protectrices prévues par le code forestier.
Lundi 15 septembre 2014, le Tribunal se prononcera sur notre demande de suspension de l’arrêté qui autorise la destruction des espèces protégées.
Un dialogue est-il encore possible ?
Nous ne pouvons que réaffirmer notre demande d’arrêt immédiat des travaux pour ramener le calme sur la zone jusqu’à ce que la justice se prononce sur toutes les illégalités que nous dénonçons.
La semaine dernière, nous étions 1200 personnes rassemblées pour défendre cette zone humide. Les gens sont impliqués dans leur territoire et la plupart nous rejoignent dans notre demande de dialogue et de moratoire.
Le dimanche 14 septembre, nous appelons à un nouveau rassemblement pour une opération de reboisement symbolique des zones sinistrées.