En 2001, les pays de l’OCDE ont décidé de mutualiser toutes les recherches touchant à la biodiversité à travers le monde. Ils ont donc créé ce qu’ils appellent une Global Biodiversity Information Facility (GBIF), réseau international dont le secrétariat est à Copenhague (Danemark) et dont le « nœud » français est installé au Muséum national d’histoire naturelle. Un premier bilan de cette initiative a été présenté le 9 décembre 2013 dans les locaux de l’Aquarium tropical de la Porte Dorée (Paris 12e).
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par Roger Cans
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Anne-Sophie Archambeau, la responsable du « nœud » français du GBIF, a d’abord indiqué que deux nouveaux pays, et non des moindres, venaient de rejoindre le GBIF (prononcer gébif) : la Chine et le Brésil, qui a mis à la disposition du réseau l’herbier historique conservé à Rio-de-Janeiro.
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Et elle a aussitôt donné la parole au représentant du secrétariat international, Alberto Tavalan. L’Espagnol a décrit le principe du GBIF. C’est un réseau constitué de 52 pays, 38 institutions et des individus appartenant ou non à des associations, dont l’objectif est de recueillir et de diffuser le maximum de données sur la flore, la faune et les fossiles du globe. En France, outre le Muséum, tous les instituts de recherche s’occupant du monde vivant sont mobilisés, tels l’IRD, l’INRA, le CNRS et les laboratoires universitaires.
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A ce jour, le GBIF a enregistré et mis en ligne 417 millions d’occurrences. Par occurrences, il faut entendre le signalement d’une espèce observée, capturée ou trouvée. Pour être exploitable, l’occurrence doit être géoréférencée, c’est-à-dire localisée très précisément. Le nombre d’espèces décrites par la taxonomie mondiale atteint aujourd’hui le chiffre de 1.426.888. Un exemple : le réseau a recueilli 302 espèces de raies (le poisson) et 12.035 « données croisées » sur les mollusques d’une île au large de Taïwan.
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Le meilleur élève en matière de données transmises au réseau est le Royaume Uni, qui totalise 37 millions de données, grâce à la participation du public, qui est invité lui aussi à fournir des données. Un pays comme l’Espagne, en revanche, ne transmet que des données scientifiques passées par le filtre des professionnels. Le réseau du GBIF ne débouche pas seulement sur un catalogue. Il permet aux chercheurs de mener des études de toutes sortes, comme par exemple le suivi des espèces invasives. Il a notamment permis d’étudier les effets du changement climatique sur la pollinisation au Brésil et dans le reste de l’Amérique latine.
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Le réseau français
Le réseau GBIF-France a été créé en 2006, avec la participation du ministère de la Recherche. Il est basé au Muséum, et animé par un ingénieur de recherche, Marie-Elise Lecoq, avec l’aide de Sophie Parmelon et de Walaa Adra. Leur tâche est multiple. Elles s’efforcent d’identifier les zones prioritaires de conservation et les zones refuges en cas de changement climatique, avec comme exemple la rosalie des Alpes (une fleur). Il faut aussi établir les seuils requis pour conserver une espèce. Une constatation, déjà : un écosystème en bon état résiste toujours mieux au changement climatique.
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Avec l’appui du ministère des Affaires Etrangères et de l’IRD, la Mauritanie a adhéré au GBIF en août et le Togo en octobre 2009. Basé à l’université de Lomé, le GIDF-Togo compte une entomologiste, un écologiste et un botaniste, le docteur Pierre Radji, botaniste responsable du « nœud » togolais. Il a indiqué que cela va permettre de moderniser l’herbier national, qui compte 8.000 occurrences. Le jardin botanique, situé à 120 kilomètres de Lomé, héberge 17.000 spécimens, dont 12.000 ont déjà été numérisés. Pour éviter les coupures de courant et d’internet, le GBIF-Togo a son centre en France. Le réseau africain, lui, est fixé en Afrique du sud.
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Laurent Poncet, du Service du Patrimoine naturel du Muséum (SPN), a rappelé qu’il existe en France, depuis 2003, un Inventaire national du patrimoine naturel (INPN), qui est une banque de référence sur la biodiversité et la géodiversité, c’est-à-dire flore, faune et paysages. L’INPN s’est relié au GBIF-France en 2008. A ce jour, l’INPN dispose d’un inventaire de 140.000 espèces, ainsi que 10.000 iconographies d’espèces.
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Frédéric Jiguet, ornithologue du Muséum rattaché au CNRS, a présenté divers modèles de niches écologiques. En France, les effectifs de bruants zizi augmentent, tandis que ceux du bruant jaune diminuent. Mais on n’en est pas encore à la niche de quelques individus comme dans les Andes, où les deux espèces de Doliornis, appelés localement cotingas, n’ont fourni que 7 occurrences pour l’un et 13 pour l’autre. Les inventaires en cours permettent par exemple de localiser les zones d’hivernage de la cigogne noire en Afrique. Le phragmite des joncs, nicheur très commun en Europe, a un cousin, le phragmite aquatique, dont on ne connaît que 13 localités hivernales en Afrique.
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Marc Pignal, du Muséum, a fait le bilan du réseau E-Recolnat. Il s’agit d’un inventaire des collections naturalistes qui remontent en France à 350 ans, et qui comportent 100 millions de spécimens (botanique, zoologie et paléontologie). Pour numériser les herbiers, il faut la plupart du temps les restaurer d’abord par collage. Le travail a été divisé en trois : l’université de Clermont-Ferrand pour « la France du Nord », l’université de Montpellier pour le Sud, et l’IRD pour l’outremer. Le Muséum n’hésite pas lui aussi à faire appel au bénévolat et à la « science participative » aujourd’hui à la mode. Les « herbonautes » sont ainsi chargés de numériser chacun un petit contingent d’images.
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Biodiversité marine
S’agissant de biodiversité marine, une équipe de l’IRD (Régis Hocdé et Sylvie Fiat) a fait le bilan de l’exploration sous-marine en Nouvelle Calédonie. Au cours de 3.000 plongées autonomes recensées, il a été enregistré 20.000 observations, 6.000 photos et recueilli 15 spécimens nouveaux. Ces observations ont permis d’identifier 4.000 espèces de coraux et de constituer un herbarium de 5.000 algues. L’IRD a transmis toutes ces données à l’INPN, qui répercute sur le GBIF.
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Les plongeurs amateurs sont aussi mis à contribution pour l’inventaire des fonds marins. Pascal Manchon, porte-parole de l’association Diveboard, et Dimitri Brosens, représentant la Plate-forme Belge Biodiversité, ont expliqué que les amateurs qui plongent pour leur plaisir sont aussi écoresponsables et de très bons observateurs du milieu qu’ils aiment explorer. Ces plongeurs enregistrés, qui sont 15.000 dans le monde, transmettent leurs carnets de plongée et leurs photos, ainsi que le géoréférencement très précis de leurs observations.
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Un autre représentant de la Plateforme Belge Biodiversité, Nicolas Noé, a rappelé que la Belgique a adhéré au GBIF dès l’origine, en 2001. Et c’est le GBIF-Belgique qui est devenu le mentor des réseaux de Mauritanie et du Togo. Les divers inventaires ont permis de dresser un atlas des araignées de Belgique, et un autre des fourmis. Les herbiers historiques du Congo ont débouché sur un inventaire des plantes endémiques d’Afrique centrale. Il a aussi été constitué un inventaire des étoiles de mer de l’Antarctique.
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Elisabeth Paymal, de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), a donné l’exemple de « la niche écologique du crabe fer à cheval » (le horse shoe crab anglais, appelé limule en français), un crustacé préhistorique qui serait actuellement menacé. Elle a aussi rappelé que le 21 juin n’est pas seulement le jour de la musique, mais aussi l’Ocean sampling day, jour où tout le monde est invité à recueillir un échantillon d’eau de mer en bouteille, afin de faire l’inventaire de sa faune et de sa flore miniature.
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Lors du débat qui a conclu la journée, la question de la traçabilité, de la validation et des doublons a été posée. Comment faire le tri entre, par exemple, quatre plantes d’herbiers différents ? Le GBIF répond que, pour tout spécimen, toute donnée ou toute occurrence, le filtre essentiel est le nom de l’organisme et de la personne qui a fourni la chose. Chaque donnée comporte une fiche d’identité qui permet au chercheur de remonter à la source. La multiplicité des sources permet de croiser l’information et de la valider.
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