Les climato-sceptiques partisans du nucléaire

 


par Claude-Marie Vadrot

« Il est temps que les Français se convainquent que l’objet du débat énergétique n’est pas de savoir s’il faut ou non « sortir du nucléaire », mais plutôt de savoir comment « limiter le plus possible l’utilisation des combustibles fossiles » qui menace notre climat. Le nucléaire, maîtrisé comme il l’est dans nos pays, présente des risques minimes comparés à ceux des gaz à effet de serre et s’il serait irréaliste de vouloir « sortir des combustibles fossiles » il serait totalement irresponsable de s’en tenir au statu quo ».

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Profession de foi du site et de l’association « Sauvons le climat » qui surfe avec habileté sur la crainte des modifications climatiques pour « vendre » du nucléaire. Tout en demandant un moratoire sur le recours à l’énergie solaire et à l’énergie éolienne et en condamnant les propositions de Greenpeace. Il est vrai que ce groupe de plus en plus influent en avançant ainsi masqué, est dirigé par Bertrand Barré, ancien du CEA et conseiller d’Areva. Nombreux sont d’ailleurs les membres de son Conseil d’administration qui sont ou ont été liés avec l’industrie nucléaire. D’ailleurs, ses « associations partenaires » sont notamment l’Association des retraités du groupe CEA, la Société française d’énergie nucléaire et l’Association des écologistes pour le nucléaire.

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Claude Allègre ayant été déconsidéré, comme son collègue géophysicien Vincent Courtillot, par sa comparution en septembre 2010 devant l’Académie des sciences et les scientifiques du Giec, d’autres « savants » et des sites « amis » ont rapidement pris le relais auprès de l’opinion publique et des parlementaires. Allègre s’est récemment refait une santé en publiant dans le Wall Street Journal, en compagnie de quinze négationnistes américains, une tribune fustigeant le GIEC applaudie par le Tea Party.
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Parmi les nouveaux intervenants on retrouve Christian Gérondeau qui n’a jamais caché son amour de l’automobile et a publié il y a 18 mois « CO2, un mythe planétaire » édité par une filiale de TF1 et qui n’est que le compte- rendu à peine modifié d’un grand raout anti-réchauffiste organisé à New York par les Américains.

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Les nouveaux venus du climatoscepticisme sont soutenus et publient leurs articles grâce à la Global Warming Policy Foundation, une organisation anglaise qui fait profession d’attaquer avec constance le Giec et ceux qui évoquent le réchauffement climatique. En liaison avec les néo-conservateurs américains, cette fondation publie de violents pamphlets contre les travaux des scientifiques du Giec, textes que l’on retrouve fréquemment sur le site de l’Institut Turgot ou celui de Wikilibéral.

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L’extraordinaire est que ces textes, traduits, modifiés, présentés différemment sont toujours les mêmes, avec les mêmes auteurs, qui tournent sans fin sur les sites et dans les revues confidentielles des uns et des autres, donnant d’autant plus l’impression d’une fausse abondance et d’une opposition foisonnante qu’ils sont sans cesse repris ou répétés par les mêmes personnalités, allant même jusqu’à pratique l’auto-citation sans que les lecteurs ou les auditeurs en soient informés. Comme ce texte, écrit par l’Américain Richard Sigmund Lindzen, 70 ans, qui se présente comme un professeur du MIT qu’il n’est plus depuis longtemps et qui a contribué, dés 2001, à dresser le Sénat américain contre la signature du protocole de Kyoto. Cet article, qui résume assez bien sa pensée, figure en permanence sur une dizaine de sites masquant à la fois leurs choix et leurs financements liés à l’industrie et au monde des affaires. Ce extrait mérite le détour.

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« L’idée d’un climat stable, immuable, est étrangère à l’histoire de la terre et de toute autre planète dotée d’une enveloppe fluide. Le fait que le monde développé soit entré en hystérie à propos de variations de quelques dixièmes de degrés de la température moyenne globale étonnera les générations futures. Une telle hystérie est à l’image de l’ignorance scientifique du public, et de la prédisposition d’un tel public à assimiler la répétition d’informations à la vérité. Elle révèle aussi l’utilisation de telles faiblesses par les hommes politiques, par les activistes environnementaux, et bien d’autres encore, après vingt années de battage médiatique ».

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Preuve, que l’on peut multiplier par cent, que les climato-sceptiques ont la vie dure. On retrouve les mêmes fustigeant le principe de précaution ou les éoliennes. Ce qui est grave, c’est que tous ces « négationnistes » ne sont hélas plus sans influence sur la presse et l’opinion publique qui tend à se désintéresser de la problématique écologique. Si elle a disparu des radars comme l’a écrit récemment Le Monde, c’est bien parce que ces « prophètes de bonheur » et du toujours plus de cette nouvelle secte se sont solidement implantés parmi les penseurs de droite et de gauche. Il est temps de les dénoncer et d’exposer publiquement et leurs noms et leurs élucubrations.

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Claude-Marie Vadrot vient de publier L’écologie sinon rien, aux éditions Delachaux et Niestlé et La centrale indémontable, petite histoire explosive du nucléaire français (de Brennilis à nos jours), aux éditions Max Milo.
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.Cet éditorial, comme tous ceux de ce site, n’engage que son auteur.

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