Finance Watch, le Greenpeace de la finance

Le 30 juin dernier, plus de 40 organisations non gouvernementales et syndicats se sont retrouvées à Bruxelles pour l’Assemblée constitutive de Finance Watch.

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par Laurent Samuel

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Cette association internationale de droit belge a pour ambition d’être l’équivalent pour les activités bancaires de Greenpeace ou du WWF pour l’écologie. Ce projet a été imaginé et construit par Pascal Canfin (JNE), député européen EELV (Europe Écologie-les Verts). Un « bébé » qu’il laisse désormais vivre sa vie, afin de respecter la nécessaire indépendance des ONG par rapport aux partis politiques et aux élus.

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L’idée de Finance Watch doit beaucoup au parcours personnel de Pascal Canfin. Après avoir fait Sciences Po et des études européennes en Angleterre, il travaille d’abord à la CFDT, avant de devenir en 2003 journaliste à « Alternatives Économiques »… et trésorier des JNE. Entre temps, il a adhéré aux Verts en 2001, et se fait élire en 2009 au Parlement Européen sous les couleurs d’Europe Écologie.

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Pascal Canfin - photo DR

À Strasbourg, Pascal Canfin s’inscrit dans la commission économie. Après s’être familiarisé avec les questions financières internationales, qu’il avoue mal connaître, il constate avec surprise : « aucune ONG n’est venue toquer à ma porte. Le travail de Greenpeace ou du WWF en matière d’environnement n’était pas fait dans le domaine financier. Or, explique Pascal Canfin, on ne peut pas faire du développement durable si le système financier n’est pas orienté sur le long terme, s’il n’intègre pas les risques extra-financiers liés au réchauffement climatique ou à la destruction de la biodiversité. De plus, la lutte contre les fraudes et les paradis fiscaux est nécessaire afin de dégager les investissements massifs exigés pour la transition écologique : 50 milliards d’euros par an pendant au moins 10 ans rien que pour la France. »

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D’où le concept de Finance Watch, porté par Pascal Canfin. Un appel est lancé en juin 2010 par 22 parlementaires européens issus de 5 groupes politiques. « Les politiques ont interpellé la société civile, en leur disant : bougez-vous ! », s’amuse Pascal Canfin. Un site internet est créé (www.callforfinancewatch.org), sur lequel s’inscrivent plusieurs milliers de personnes. Des réunions ont lieu avec de nombreuses organisations, dont la Confédération européenne des syndicats ou le Bureau européen des consommateurs. En février 2011 à Bruxelles, une réunion adopte un accord sur une charte, les statuts, les missions, l’organisation opérationnelle, le budget, le plan de financement. Aujourd’hui, une quarantaine d’organisations ont rejoint Finance Watch. Le Conseil d’administration est composé de 4 représentants des ONG et 3 personnalités qualifiées issues de la finance (sans conflits d’intérêt).

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Mais Finance Watch ne risque-t-il pas d’être une « courroie de transmission » au service des partis Verts ? « Les parlementaires européens ne seront pas représentés, et le Parlement ne donnera pas d’argent, répond Pascal Canfin. Le financement viendra pour moitié de la DG Marché intérieur de la Commission européenne, dirigée par Michel Barnier. Le reste de l’argent sera fourni par les organisations elles-mêmes, des fondations privées comme la Fondation pour le Progrès de l’Homme, et les dons des particuliers. Budget prévu pour 2012 : 2 millions d’euros. Avec l’ouverture d’un bureau à Bruxelles dès septembre, puis d’antennes à Paris, Londres et Francfort, cela devrait permettre à Finance Watch d’assurer en toute indépendance et compétence ses trois missions définies par Pascal Canfin : « Contre-expertise, contre-lobbying et communication ».

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Cet article est d’abord paru dans le N° 3 (juin 2011) de la Lettre Options Futurs de Dominique Martin Ferrari (JNE), dont vous pouvez consulter le dernier numéro en cliquant ici.