ZAD : Zéro Analyse Diplomatique

 Il se passe des choses bien étranges dans la région nantaise…

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par Laure Subirana

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Une Zone d’Aménagement Différé pour les uns, autrefois considérée par les autres comme Zone A Détruire, s’est transformée en Zone A Défendre, qui elle-même s’est transformée en Zone A Déconstruire, voire en Zone A Détruire… mais pour les premiers cités cette fois-ci.

Actuellement, il semble que ce soit devenu une Zone A Divagations diverses. En plus des tritons crêtés, on y voit des vaches, des anarchistes, des poules, des agriculteurs, des oiseaux gazés, des CRS, des alter-quelque-chose, des insectes, des journalistes, des ultra … le tout dans une ambiance de Zizanie Assez Déconcertante.

Une histoire en Zigzag, A Démêler pour essayer de comprendre ce que cette situation dit de notre société.

Pour y voir clair, reprenons les choses par le début :

1 – Des décideurs d’un ancien gouvernement ont imaginé un développement économique grâce à la construction d’un aéroport sur une zone humide riche de biodiversité.
2 – La plupart des habitants humains de cette zone l’ont donc quittée moyennant finances. Les habitants non humains sont restés.

3 – Des « zonards », humains souvent cultivés, trouvant la zone laissée libre, ont jugé cohérent… de la cultiver. Notons au passage que ces personnes ne donnent généralement pas leur voix aux gouvernants mais donnent la parole aux batraciens qui, en l’occurrence, ne voulaient pas d’un aéroport sur leur tête.

4 – Les habitants des villes qui ne connaissent pas les amphibiens mais qui connaissent les désagréments du bruit des avions, soutenus par les entreprises du BTP qui voyaient dans la construction d’un aéroport de quoi faire décoller leur bénéfices, se sont donc battus contre les tenants du : « Nous sommes la Nature qui se défend ».

5 – S’en suivent des années de luttes plus ou moins légales à grands coups de droits, de lois, des votes et de textes, la difficulté des dirigeants politiques à revoir la décision ancestrale puis, finalement, le projet d’aéroport de Notre Dame des Landes abandonné pour des raisons qu’en définitive chacun imagine, mais que seul le signataire connaît.

Décision longuement réfléchie ?

La suite pourrait en faire douter.

Nos énarques ont-ils suivi de cours de psychologie élémentaire durant leur cursus ? Il est vrai que la formation de base est donnée à la maternelle (ce qui excuserait un oubli) et que la qualité des cours est inversement proportionnelle au niveau social des élèves.

Dans les maternelles des quartiers dits sensibles, on sait bien que si on « attaque » quelqu’un qui ne vous « attaque » pas, il est quasi certain que le quidam attaqué se révoltera et que ses copains viendront pour le défendre.

La chose avait-elle été envisagée ?

C’est à espérer. Mais alors, pourquoi nos élus, nos représentants, ont-ils souhaité cette situation qui, depuis le centre de tension régional, via les médias et les réseaux sociaux, gagne tout le pays et divise les Français entre les « pour », les « anti » et ceux, majoritaires, qui ne se sentent pas concernés ?
– Fallait-il créer une diversion face aux multiples points de blocage qui endolorissent la société (justice, SNCF, hôpitaux, anniversaire de mai 68 dans les facs…)
– Les résistants des uns étant les terroristes des autres, fallait-il attirer sur zone tous les « ultras » et refermer la nasse avant qu’ils n’essaiment sur d’autres ZAD (devenues Zones Au Devenir incertain) ?
– Fallait-il appliquer au monde économique le principe ERC (Eviter-Réduire-Compenser) cher aux écologistes? En effet, n’ayant pu Eviter l’abandon du projet initial, n’ayant pas davantage de plan pour Réduire le manque à gagner, l’Etat Compense en laissant exploser, par procuration, la colère des défenseurs de l’aéroport symbole d’une course éperdue vers… ?…

Ce conflit des extrêmes est révélateur des questionnements qui agitent notre société et les individus dont nous sommes qui la composent. Ce sont plus que jamais deux visions du monde qui s’opposent, avec le même slogan : Penser global – Agir local.
– Les Zadistes veulent penser la globalité localement et proposent des projets collectifs qui ne rapportent qu’aux individus de la ZAD.
– Le gouvernement veut penser le local globalement : un seul agriculteur « conventionnel » sur la zone pourrait exporter ses produits à l’autre bout de la Terre et améliorer ainsi le PIB de la France.

La main tendue derrière les boucliers saura-t-elle rencontrer la main tenant la charpente à consolider ? Les troupes armées laisseront-elles place aux troupeaux de moutons ou bien les véhicules blindés quitteront-ils le terrain au profit de tracteurs surpuissants ?

En attendant, CRS et Zadistes-ultras s’affrontent, les uns pour gagner leur vie, les autres pour lui donner du sens. Mais que se passerait-il s’il devait y avoir d’autres morts que les insectes suffocants dans les nuages chimiques des lacrymogènes ou grillant dans les flammes des cocktails Molotov ? A qui profiterait le crime ?

Cela dépendrait sûrement de la couleur bleue, verte ou noire de la victime de cette guérilla de civilisation. Car le fait est que la Zone, Aménagée-Déménagée au jour le jour, est devenue une Zone A Diagnostic : elle nous informe sur l’Etat de notre société.

18 avril 2018

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