Climat : rien n’est gagné…

 


par Olivier Nouaillas
vice-président des JNE

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En matière de climat, nous vivons de drôles de paradoxes. Alors qu’avec des mois de septembre, d’octobre et maintenant de novembre particulièrement doux, l’année 2014 devrait être une des années les plus chaudes qu’ait jamais connu la Terre depuis 1880, un vent d’optimisme semble enfin souffler sur les négociations climatiques. Coup sur coup, en effet, trois bonnes nouvelles – ou présentées comme telles, ce qui n’est pas tout à fait la même chose… – sont survenues.

 

Tout d’abord, le 24 octobre, les 28 pays de l’ Union européenne se sont engagés à réduire d’ « au moins 40 % » les réductions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport à 1990.

 

Ensuite, le 12 novembre, les Etats-Unis et la Chine, s’engagent mutuellement à réduire leur émissions de gaz à effet de serre. Les Etats-Unis annoncent une réduction de 26 à 28 % de leurs émissions d’ici à 2025 par rapport à 2005 et la Chine promet d’atteindre le pic de ses émissions de CO2 « autour de 2030 » et donc d’amorcer une baisse de ses émissions de gaz à effet de serre après.

 

Enfin, le 20 novembre, le Fonds vert pour le climat,annonce qu’il a levé 9,5 milliards de dollars pour aider les pays en développement à lutter contre le réchauffement climatique. Une première d’autant plus attendue que la création de ce fonds de capitalisation remonte au sommet de Copenhague en 2009 et que, jusqu’à présent, ses caisses étaient désespérément vides. Même si on est encore très loin des 100 milliards par an promis par les pays riches d’ici à 2020 ..

 

A la veille de la tenue de la COP 20 qui doit se tenir à Lima (du 1er au 12 décembre), la route apparaît, en tout cas, subitement dégagée pour la COP 21, la grande conférence sur le climat prévue à Paris en décembre 2015 et qui doit trouver un accord mondial de réduction des gaz à effet de serre, chargé de prendre la suite du protocole de Kyoto. Sauf qu’il … ne faut pas aller trop vite.

 

Entre ceux qui pensent que « nous sommes sauvés » – ceci avant que le moindre accord soit signé sous l’égide des Nations-Unies – ou au contraire que « tout est foutu » et qu’il n’y a désormais plus rien à attendre de ces grandes sommets environnementaux, il y a la voie étroite des faits.

 

Faisons d’abord remarquer aux plus optimistes que des déclarations d’intentions, même vertueuses, n’ont rien à voir avec un accord juridique contraignant signé par 196 pays. Car c’est bien de cela qu’il s’agira à Paris en 2015. D’autant plus que le précédent du protocole de Kyoto, signé en 1997 et très imparfaitement appliqué, montre que, sans mécanismes de surveillance et sans doute aussi un taxe carbone mondiale, les paroles s’envolent dans l’air. Comme le CO2…

 

Et aux plus pessimistes, faisons leur observer que ce n’est tout de même pas rien que les Etats-Unis et la Chine, les deux pays les plus pollueurs de la planète – 45 % des émissions de gaz à effet de serre à eux deux –, s’engagent ensemble pour la première fois à réduire leurs émissions. D’autant plus qu’en Chine, la contestation sociale sur les immenses problèmes de pollution monte chaque jour un peu plus. Et qu’il n’est pas sûr que les Pékinois – pour ne parler que d’eux – attendent bien sagement une amélioration de la qualité de l’air jusqu’en 2030…

 

Certes également, les républicains, de farouches climato-sceptiques, tablent sur la défaite des démocrates en 2016, après les huit ans de Barack Obama, pour revenir sur un éventuel engagement américain. Mais là aussi, l’opinion publique pousse dans un autre sens : rappelons-nous les 350.000 manifestants à la Marche pour le climat dans les rues de New-York, le 21 septembre dernier. L’une des plus importantes manifestations écologiques de ces dix dernières années.

 

Le 18 novembre dernier, à l’Agence parisienne du climat, lors d’une conférence de presse organisée par l’AJEC 21 (l’Association des journalistes pour l’environnement et le climat, née de la volonté commune des JNE et de l’AJE pour mieux couvrir les enjeux de la COP 21) le climatologue Jean Jouzel, vice-président de Giec, faisait preuve, lui, d’un optimisme … mesuré : « Il y aura sans doute un accord à Paris, confiait-il. Toute la question est de savoir s’il sera assez ambitieux. Notamment pour rester en dessous de la barre des 2 ° C. C’est maintenant que tout se joue ». Les différentes mobilisations en cours de la société civile – d’Alternatiba au « Jeûne pour le climat », sans oublier les autres initiatives – joueront sans doute leur rôle pour maintenir l’indispensable pression sur les négociateurs.

 

Olivier Nouaillas vient de publier Le changement climatique pour les Nuls (Editions First, octobre 2014) et tient le blog « Planète verte » sur lavie.fr

Cet éditorial, comme tous ceux de ce site, n’engage que son auteur.