Rio+20 : un petit déjeuner des JNE avec l’équipe de l’IDDRI

Même à Rio, les JNE n’oublient pas une de leurs traditions : les petits déjeuners. Invitée du 22 juin : l’équipe de l’IDDRI (Institut du développement durable et des relations internationales).

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par Dominique Martin Ferrari

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Ce matin vendredi 22 juin, un vent violent est venu perturber notre petit déjeuner. C’est parfait, le ciel en sort tout dégagé, et enfin, ce crachin sous lequel nous avons conclu la pire journée de négociations, est balayé.

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Très en forme, ce matin, nous avons décidé que le Rio Centro venait à nous.

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Ce sommet qui devait parler de la crise écologique, entre autres, a été des plus discrets sur la question du climat. Nous attendons Jean Jouzel avec impatience. En vain; Jean ne viendra pas; rencontré quelques heures plus tard, il aura la désagréable surprise de voir nos mails regroupés dans la boite de ses indésirables !… Ce n’est que partie remise.

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A 10 h, l’IDDRI nous arrive en délégation. Après comparaison de nos logements (tout à notre avantage), nous sommes tout ouies : honneur à la Présidente, Laurence Tubiana, qui nous confirme que Rio s’achève sur un mauvais texte : « il s’agit d’un accord par le vide : on a enlevé tout ce qui ennuie, tous les sujets qui fâchent avant, et sans les ministres, et avant l’arrivée des politiques ». L’IDDRI se demande également si l’Europe, qui s’est trouvée tout au long de la négociation en porte à faux, avait compris le jeu diplomatique instauré par le Brésil. Ce qui permet d’ailleurs de reconnaître que « l’opération diplomatique avait été menée de main de maître » par le Brésil, qui n’avait pas voulu jouer la fracture au sein du G77, « mais les divergences réapparaîtront ».

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La Chine a été curieusement silencieuse. Les pays veulent diriger et les institutions onusiennes en prennent un coup. Un regret ? Que le Brésil n’ait pas donné de souffle à cette conférence, « car qui aurait pu faire cela en dehors d’un grand pays émergent ? »
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Selon l’IDDRI, les Nations Unies portent une responsabilité : « en 1992, nous avions le rapport Brundtland, là nous n’avions aucun diagnostic partagé. Les premiers documents sont sortis fin janvier, et Geo5 deux semaines avant la conférence. Nous n’avions pas de diagnostic. » Et « si nous l’avions eu, complète Lucien Chabason, nous aurions pu mesurer la faiblesse du pilier environnement. »

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Selon les membres de l’IDDRI, les grands rapports sont importants et ont été négligés, au profit du débat concernant le statut juridique du PNUE.

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Questions JNE

 

L’ONU est-elle au bout d’un cycle ? Comme les grandes ONG ?

Réponse de L. Chabason : « Dans le système onusien, on peut faire des choses ambitieuses, il y a beaucoup d’espace et cela dépend des gens qui le dirigent. » Selon l’IDDRI, le PNUE, pourtant soutenu par les pays européens, aurait pu se servir de la dimension économique pour renforcer l’environnement. C’est raté.

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Qu’en est-il de l’économie verte ? « L’économie verte, c’est tout ce qui ne doit pas enrayer le commerce. » Cette maxime est répétée tout au long du texte.

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En ce qui concerne l’élargissement du PNUE ? « C’est un progrès. Il faut oublier l’OME. Bâtissons sur l’élargissement proposé, en demandant le renforcement des moyens. Pour l’instant, il sort un peu renforcé, mais devra toujours vivre des contributions volontaires. La Chine vient de verser 6 millions de dollars, mais à condition qu’ils soient alloués aux programmes en développement. » Remarque complémentaire : « pourvu que cette règle de paiement volontaire ne dicte pas sa politique.»

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Les objectifs du développement durable. Important ? Ils sont prévus pour remplacer les objectifs du millénaire en 2015. C’est intéressant : les objectifs du millénaire ont eu un grand effet, même s’ils ne sont pas atteints. Ils ont restructuré certains pays en développement. Ils ont eu des effets sur le Brésil, sur la Chine. Ils ont entraîné le mouvement des fondations et entraîné leurs financements. Les objectifs du développement peuvent à l’identique, avoir un effet durable puissant d’organisation. « Si elle prend forme ! »

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Une procédure très rapide pourrait signifier une vraie volonté de faire quelque chose, et ce serait une sortie positive. Un comité tente de boucler le rapport pour fin 2014. Il sera composé de 30 membres, soit six par région onusienne.

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Sur les océans ? Nous avons un texte mou. Signalons un bon passage sur les pêcheries, mais une grande faiblesse du texte sur les pollutions, rien sur les pollutions telluriques et surtout, pas un mot sur l’offshore profond. La seule référence aux menaces environnementales est celle sur les débris plastiques.

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« L’absence d’avancée sur la haute mer est une catastrophe. Nous travaillons sur ce texte depuis trois ans. Rien n’est prévu « au delà des zones couvertes par la juridiction », on ne peut donc contrer les pavillons de complaisance. Les zones de haute mer restent res nullus et la colonne d’eau non gérée. » La question est donc de savoir s’il l’on peut progresser sur ces thèmes avec la législation actuelle ou s’il faut une nouvelle législation. La conférence ne tranche pas et se donne deux ans pour répondre à la question, deux ans importants de forte intensification de la prospection en haute mer. Les principaux pays qui se sont opposés à cet accord sont les Etats-Unis, le Canada, le Venézuela.

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« Je constate, a remarqué Lucien Chabason, que lorsqu’on est entre environnementalistes (exemple conférence de Nagoya), on progresse. Ce sont des gens qui ont la même foi, le même sens du devoir. Quand on est dans le développement durable, on n’avance pas. Il faut agir sur cette interface, mais il faut savoir garder son autonomie environnement. »

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Concernant la décision de Nagoya, de mise en protection de 10 % supplémentaires de zones marines protégées, elle est « reconnue » mais pas « soutenue ».

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L’expérience des dialogues ? De l’avis de tous, elle a été mal préparée, mais reste un exercice très intéressant. « Cela pourrait être fait avant chaque grande conférence et cela permettrait de mettre sur la table l’argumentation des populations, de faire émerger les propositions divergentes. Nous allons travailler sur ce thème, tenter de savoir qui y a participé à la concertation. »

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L’IDDRI pense que le travail en amont avec les grandes ONG a été insuffisant, mais l’expérimentation doit se poursuivre.

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