Le très discret guépard du Sahara

Voici un article sur le guépard au sud de l’Algérie, publié dans La Nouvelle République (Algérie) du lundi 2 janvier 2017.

.

par M’hamed Rebah

Laurie-Marker
Laurie Marker, fondatrice et directrice exécutive du CCF (fonds pour la conservation du guépard), avec un guépard – photo CCF

.
Très rarement visible dans la nature, le guépard a fait irruption dans les médias, remplissant colonnes et écrans après l’alerte lancée par le Fonds pour la conservation du guépard (CCF, fondé en 1990, basé en Namibie), à propos du risque de son imminente extinction.

.

La sonnette d’alarme a été tirée dans un rapport intitulé Le déclin mondial du guépard et ce que cela signifie pour la conservation, écrit par le Dr Laurie Marker, fondatrice et directrice exécutive de CCF, et le Dr Anne Schmidt-Kuentzel, directrice adjointe de la santé animale et de la recherche de CCF, et publié dans le journal Proceedings de la National Academy of Sciences.

.

L’état des lieux dressé concernant la population restante de guépards réduite à 7 000 en Afrique et un petit nombre de moins de 50 en Iran, a amené le CCF à revendiquer le passage du statut des guépards d’espèce « vulnérable » à « espèce menacée ».

.

Les médias qui ont rapporté l’information ne font pas état d’une référence à l’Algérie, mais les écologistes algériens et plus particulièrement les spécialistes du guépard se sentent certainement directement interpellés. En mars 2016, dans une déclaration au site d’informations Huff Post Maghreb, Abdelkader Benkheira, directeur de la protection de la faune et la flore à la Direction générale des Forêts, a confirmé la présence du guépard sahélo-saharien (Acinonyx jubatus hecki) dans les massifs du Tassili N’Ajjer et du Hoggar, au sud du pays, tout en rappelant qu’il est classé en « danger critique ». Si les effectifs de la population des guépards du Sahara déclinent dans son aire globale (bande sahélo-soudano-saharienne), ils sont par contre, a-t-il fait remarquer, en augmentation en Algérie. Il s’appuie sur « les inventaires d’organismes nationaux et internationaux qui montrent que la plus forte concentration de la population du guépard sahélo-saharien se trouve dans notre pays ».

.

SaharanCheetah
Guépard sahélo-saharien (Acinonyx jubatus hecki) – photo Wikipedia

En 2012, déjà, des spécialistes du félin de l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) avaient relevé que « l’Algérie et le Tchad supportent la plus grande majorité des guépards de cette région, comprenant plus de 88 % de l’aire de l’habitat de l’espèce ». Ils estimaient leur nombre en Algérie à 38.

.

Abdelkader Benkheira a donné quelques indications sur leur localisation dans le désert de Tanazrouft et le Tassili N’Ajjer qui offrent l’eau, le gibier et la quiétude qui sont « les conditions optimales pour la vie et la reproduction des guépards ». Mais ils sont aussi dans d’autres régions du Sahara, a-t-il ajouté sans plus de précision.

.

On comprend sa prudence, le guépard du Sahara est l’une des espèces les plus menacées d’Afrique du Nord. A l’échelle internationale, il figure sur l’annexe I de la CITES à laquelle l’Algérie a adhéré en décembre 1982 et il a été intégré dans la liste rouge des espèces en danger d’extinction par l’UICN en 2001. En Algérie, la loi sur la chasse de 2004 le protège et l’article 3 de l’ordonnance du 15 juillet 2006 l’a inscrit, avec la gazelle dorcas, en tête de la liste des espèces animales menacées de disparition. Sa chasse est interdite. L’infraction est punie d’une peine d’emprisonnement d’un an à deux ans et d’une amende de cent mille dinars (environ 850 euros) à trois cent mille dinars (environ 2500 euros). En cas de récidive, la peine est portée au double.

.

Plusieurs institutions algériennes sont mobilisées pour sa protection et sa réhabilitation. Une opération de conservation de l’espèce dans les régions du sud (Tamanrasset et Illizi) a été mise en place dans le cadre du programme UICN de l’Afrique du Nord, dans le but de récolter des informations relatives à l’état, à la distribution et à l’écologie du guépard. Il était question également de la création d’un centre de reproduction des espèces sahélo-sahariennes à Ghardaïa pour servir à sa réintroduction en milieu naturel. Pour sa part, Abdelkader Benkheira a parlé d’un plan pour la réhabilitation du guépard en Algérie, envisagé par l’Agence nationale pour la conservation de la nature (ANN), en partenariat avec l’UICN.

.

.


.